Tandis que certains pays prévoient d'envoyer leurs spationautes sur la Lune et que des entreprises envisagent carrément de s'y installer, plusieurs questions se posent : à qui appartient ce satellite ? A-t-on le droit de l'exploiter et d'y élire domicile ?
L'astre n'a jamais autant été dans le viseur des Terriens, cinquante ans après les premiers pas de Neil Armstrong sur le sol lunaire. Il y a deux ans, le président Trump affirmait déjà que les États-Unis pensaient renvoyer des hommes sur la Lune pour «laisser [leur] empreinte», et pas seulement celle de leurs semelles. La Nasa envisage elle de construire des bases lunaires pour préparer de futures expéditions sur Mars.
Plusieurs traités internationaux
Quant aux entreprises visionnaires pour certains, totalement perchées pour d'autres, elles ont l'intention, comme Amazon, d'installer une base sur la Lune occupée par des employés en chair et en os. Même Thomas Pesquet, le spationaute adulé par les Français, ne cesse d'exprimer son souhait de fouler un jour ce sol hostile.
Tous, aux quatre coins du monde, visent la Lune mais en ont-ils le droit ? A priori, la question peut sembler stupide : le ciel, les étoiles, les astres et les planètes qui nous entourent n'ont pas de propriétaires. Un Traité de l'Espace établi sous l'égide de l'ONU en 1967 avait même stipulé dans son article II que «l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, ne peut faire l'objet d'appropriation nationale par proclamation de souveraineté, ni par voie d'utilisation ou d'occupation, ni par aucun autre moyen». En 2005, sur les 178 États de l'ONU, 97 avaient ratifié ce traité et 27 l'avaient signé. La Lune n'appartiendrait donc à personne, ou à tout le monde, c'est selon.
Sauf que depuis, l'Homme s'est lancé à la conquête de l'espace et a commencé à exploiter ses ressources. En 1979, la communauté internationale a donc rédigé un autre Traité pour que cette exploitation se fasse «au bénéfice et dans l'intérêt de tous les pays». Mais ce texte n'a pas eu le même succès que celui de 1967 : seulement quinze pays, dont la France, l'ont signé, mais pas un seul leader de la conquête spatiale comme les États-Unis, la Russie ou la Chine. Ces derniers pensaient peut-être déjà utiliser l'hélium-3 disponible sur la Lune, pour en faire un supercarburant pour fusées.
Le vide
De nos jours, le vide juridique autour des questions spatiales est tout bonnement intersidéral. Et certains en profitent : en 2015, les États-Unis ont ainsi voté le SPACE Act, qui stipule que les «citoyens américains peuvent enteprendre l'exploitation et l'exploitation commerciales des ressources spatiales», précisant toutefois que le pays «n'affirmait pas leur souveraineté, règne ou droits exclusif ou prioritaire, ni possession, d'aucun corps céleste». En effet, même si c'est leur drapeau qui «flotte» sur la Lune, il ne signifie pas que les Américains l'ont colonisée.
Reste que certains sont persuadés d'en être les propriétaires : depuis 1999, quelques sociétés américaines comme Lunar Republic Society ou Lunar Embassy vendent des parcelles de terrains lunaires contre quelques dizaines d'euros, avec plusieurs documents à l'appui pour prouver votre titre de propriété. Un achat qui, évidemment, ne sera jamais reconnu par le droit international.
Finalement, la question «à qui appartient la Lune» est bien plus complexe qu'il n'y paraît. En théorie, c'est un bien commun de l'humanité mais dans les faits, le vide juridique est tel qu'il invite à une véritable course entre les puissances spatiales pour déterminer qui finira par la décrocher.