A quelques heures de l'arrivée de la tempête tropicale Barry sur les côtes de Louisiane, les autorités américaines multipliaient les mises en garde mais les consignes données aux habitants étaient désormais de rester calfeutrés.
Des milliers d'habitants de cet État du Sud, où le souvenir du dévastateur ouragan Katrina en 2005 est encore présent, ont évacué vendredi les zones côtières face à l'avancée de ce qui devrait se transformer en ouragan --le premier de la saison dans l'Atlantique-- juste avant de toucher terre tôt samedi matin non loin de La Nouvelle-Orléans.
Pour entrer dans la catégorie 1 des ouragans, il devra souffler au moins à 119 km/h. Selon le dernier bulletin des météorologues à 00H00 GMT samedi, ses vents allaient à 100 km/h. Certains habitants ont décidé d'obéir aux ordres d'évacuation. Mais d'autres, en particulier dans les bayous, ont choisi de braver les éléments.
Dung Nguyen, pêcheur de crevettes à Boothville à une centaine de kilomètres de La Nouvelle-Orléans, lance à l'AFP: «Je n'ai pas peur». Au grand dam de son fils Nam qui confie lui avoir dit que c'était «le calme avant la tempête». «Mais il est de la vieille école», souligne-t-il.
Même résistance à quelque distance de là. «On est déjà restés pendant des gros ouragans alors qu'on aurait dû partir», explique Keith Delahoussaye, devant son mobile home à Port Sulphur. «Mais on partira si on voit que l'eau monte jusqu'ici», dit ce mécanicien de 60 ans, surveillant le niveau du Mississippi tout proche. «Je pense que ça fait partie de la culture».
Des dizaines --peut-être même des centaines-- d'habitants de Plaquemines, non loin, se sont réfugiés dans des «camps des marais», les bayous du delta seulement accessibles par bateau.
Sols saturés
Ce n'est pas tellement le vent qui suscite les inquiétudes mais plutôt les pluies diluviennes et la submersion côtière (jusqu'à 1,80 mètre attendu) qui l'accompagnent. D'autant que le sol de la région est déjà bien saturé après de récents orages et une pluviosité importante depuis le début de l'année ayant provoqué plusieurs crues du Mississippi.
Facteur aggravant, relèvent les météorologues : la faible vitesse de déplacement de la tempête «va avoir pour conséquence une longue période de fortes chutes de pluie et de risque d'inondation», en particulier dans le delta du Mississippi et au-delà «jusqu'au début de la semaine prochaine».
La tempête devrait apporter 15 à 25 cm de pluie sur une large bande de la côte, mais l'accumulation des précipitations pourrait atteindre 50 cm par endroits. Et le Mississippi, plus grand fleuve d'Amérique du Nord, atteignait déjà vendredi son niveau de crue (5,18 mètres) à La Nouvelle-Orléans, protégée par des digues de 6,10 mètres. Le fleuve devrait culminer à 5,79 mètres, selon les météorologues.
L'Etat reste traumatisé par le souvenir du puissant ouragan Katrina en août 2005. Les digues protégeant la Nouvelle-Orléans avaient cédé sous le poids de l'eau, inondant 80% de la cité et causant un millier de morts, sur un total de plus de 1.800 durant la catastrophe.
Mais les digues devraient tenir, a affirmé le gouverneur John Bel Edwards, qui a décrété l'état d'urgence mercredi. Le président américain Donald Trump a déclaré jeudi soir la Louisiane en situation d'urgence, permettant aux agences fédérales de participer aux secours.
- Couvre-feu -
La tempête se trouvait vendredi soir à 135 kilomètres au sud-est de la ville côtière de Morgan City, située non loin de La Nouvelle-Orléans, selon le dernier bulletin du Centre national des ouragans (NHC). Certaines routes de la principale ville de Louisiane se trouvaient déjà sous les eaux depuis mercredi à la suite de forts orages. Les activités du port ont été perturbées et le concert des Rolling Stones prévu dimanche au Superdome a été reporté à lundi.
La mairie de la ville, dont les 118 pompes sont prêtes à évacuer l'eau, a ordonné un couvre-feu à partir de 20H00 vendredi (00H00 GMT samedi). D'autres bourgades ont fait de même.
Dans le célèbre Quartier français, des sacs de sable protègent les pas-de-porte des magasins et les devantures sont recouvertes de planches de bois. Pour le réseau GSCC, qui rassemble des professionnels du climat du monde entier, «le risque de Barry est différent de celui de Katrina: en 2005, les digues de la côte avaient cédé, cette fois-ci, ce sont les digues du fleuve qui seront testées».
«La température à la surface de l'eau du Golfe du Mexique est au-dessus de la moyenne et fournit au système des forces pour s'intensifier», a expliqué dans le communiqué du GSCC Jill Trepanier, spécialiste des phénomènes climatiques à l'université de Louisiane. Selon elle, Barry est un parfait exemple des conséquences du changement climatique.