Les pays de l'Union africaine (UA) devaient lancer symboliquement dimanche en fin de journée à Niamey la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlec), qui doit constituer un pas vers la «paix et la prospérité en Afrique».
«L'entrée en vigueur de la Zlec est l'événement le plus important dans la vie de notre continent depuis la création de l'OUA (Organisation de l'unité africaine) en 1963 et sa transformation en Union africaine», a affirmé en ouverture du sommet l'hôte nigérien, le président Mahamadou Issoufou, un des plus ardents promoteurs de la zone.
Quelque 4.500 délégués et invités, dont 32 chefs d'Etat et plus de 100 ministres étaient présents pour l’événement dans la capitale nigérienne, qui a fait peau neuve avec un aéroport flambant neuf, des routes élargies et de nouveaux hôtels et bâtiments.
«Un vieux rêve se réalise. Les pères fondateurs doivent en être fiers», a lancé le président de la commission de l'Union africaine Moussa Faki Mahamat, en soulignant que la Zlec devenait «le grand espace commercial au monde».
Le géant nigérian, réticent jusque-là, et son voisin le Bénin ont signé l'accord dimanche en ouverture du sommet, sous les applaudissements de leurs homologues. 54 des 55 pays africains vont constituer ce nouveau marché. Seule l'Erythrée n'a pas signé l'accord.
De plus, 27 pays ont déjà ratifié l'accord, a précisé Moussa Faki.
«Le chemin est encore long», a commenté le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi. D'âpres négociations se poursuivent en coulisses sur la mise en oeuvre progressive de la Zlec, qui doit réunir 1,2 milliard de personnes.
Les discussions achoppent notamment sur le calendrier des réductions des taxes douanières et "la vitesse à laquelle on les fait baisser» mais aussi sur les biens importés de l'étranger par des pays ayant des accords avec l'extérieur ou encore ne les transformant que de manière minime, a confié une source diplomatique.
Le marché devrait être actif à partir de 2020. «Il faut donner un calendrier pour que tout le monde puisse jouer son rôle dans la préparation du marché (unique), alors nous avons recommandé au sommet que la date soit le 1er juillet 2020», a expliqué le commissaire au Commerce et à l'Industrie de l'UA, Albert Muchanga.
Lutte contre le jihad
Chiedu Osakwe, le négociateur en chef nigérian, souligne que la «libéralisation du commerce doit s'aligner sur des réformes structurelles» internes. «Aucun pays ne va tout libéraliser» d'un coup, souligne-t-il, précisant que le processus devrait s'étendre sur plusieurs années.
La Zlec doit favoriser le commerce au sein du continent et attirer des investisseurs. L'UA estime que sa mise en œuvre permettra d'augmenter de près de 60% d'ici à 2022 le commerce intra-africain, alors que les détracteurs du projet évoquent le manque de complémentarité des économies et craignent que des importations bon marché ne portent préjudice aux petits producteurs agricoles et industriels.
Parmi les autres dossiers au programme du sommet, figurent notamment la lutte contre le jihadisme, la situation au Soudan, suspendu de l'UA, ou encore le Fonds de la paix et l'émigration.
Les pays de la force G5-Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Mauritanie, Tchad), qui peinent dans leur lutte contre les jihadistes en raison notamment du manque de ressources, chercheront l'appui des autres Etats africains dans leur quête d'un plus grand soutien de l'ONU.
Le président Issoufou a aussi appelé samedi à «la mise en place d'une coalition internationale de lutte contre le terrorisme au Sahel, à l'image de la coalition mise en place pour lutter contre Daech (groupe Etat islamique, NDLR) au Moyen-Orient».
Pour ce sommet, Niamey a été placée sous haute surveillance. «Nous avons un dispositif spécial de plusieurs milliers d'hommes», a assuré Mohamed Bazoum, le ministre de l'Intérieur d'un pays qui fait face à des attaques récurrentes de groupes jihadistes dans l'Ouest et au groupe islamiste Boko Haram dans le Sud-Est.