La course à Downing Street est lancée. La Première ministre britannique Theresa May a annoncé vendredi 24 mai qu’elle démissionnerait de son poste le 7 juin prochain, poussée vers la sortie par l’opposition comme par son propre camp.
Elle restera tout de même en fonction jusqu’à l’élection d’un nouveau chef du parti conservateur, d’ici au 20 juillet. La dirigeante paye sa mauvaise gestion du Brexit, déjà reporté à deux reprises et en pleine impasse après les trois rejets successifs par les députés des accords qui leur ont été soumis. Theresa May laissera à son successeur ce dossier explosif, ainsi qu’un paysage politique dévasté.
Le challenge du divorce avec l’UE
La Première ministre n’a pas encore quitté Downing Street que les prétendants se bousculent déjà au portillon. Ils sont en effet une dizaine à postuler, de l’ancien ministre du Brexit Dominic Raab aux ministres de l’Environnement et des Affaires étrangères Michael Gove et Jeremy Hunt.
Mais c’est Boris Johnson, ex-chef de la diplomatie et figure de proue des pro-Brexit lors du référendum de juin 2016, qui tiendrait la corde. «Il s’est imposé depuis trois ans comme le contrepoint de Theresa May, et n’a jamais été ambigu sur le Brexit», estime Elvire Fabry, chercheuse à l’Institut Jacques Delors.
Le divorce avec l’UE, prévu d’ici au 31 octobre, phagocyte sans surprise les débats entre les candidats, ce dossier étant le principal défi que devra relever le prochain Premier ministre. Et cela ne s’annonce pas simple. Certains prétendants, à l’instar de Boris Johnson, n’excluent pas l’hypothèse d’une sortie sans accord, communément appelée «no deal». Sauf que les députés britanniques veulent à tout prix éviter cette option, potentiellement désastreuse pour l’économie du pays (la Banque d’Angleterre évoque une baisse de 8 % du PIB dans le scénario du pire).
D’un autre côté, Jeremy Hunt, notamment, défend une renégociation de l’accord de retrait avec Bruxelles. Mais la Commission européenne a fait savoir vendredi 24 mai que la démission de Theresa May ne change «rien» à la position des Vingt-Sept sur le traité de retrait déjà négocié, qu’elle refuse d’amender. Le successeur de Theresa May risque donc de se retrouver dans la même situation inextricable que la future ex-dirigeante.
Une formation aux abois
En plus de l’épineux dossier du Brexit, le prochain locataire du 10 Downing Street devra composer avec un parti conservateur, dont il va prendre la tête, en pleine crise. Après une première déroute aux élections locales début mai, lors desquelles ils ont perdu près de 1 300 élus, soit plus d’un sur quatre, les Tories ont connu une nouvelle débâcle aux élections européennes la semaine dernière (tout comme leurs opposants travaillistes).
Sanctionnés pour leurs atermoiements sur le Brexit, ils ont recueilli seulement 9 % des voix – le pire score de leur histoire – terminant seulement cinquièmes, loin derrière le Parti du Brexit de Nigel Farage (32 % des suffrages). Le remplaçant de Theresa May devra donc s’atteler à reconstruire un parti en miettes, broyé par le Brexit. Au risque sinon de perdre le pouvoir lors des prochaines élections générales, prévues en 2022. Voire avant si le gouvernement ne tient pas jusque-là.