La tension monte d'un cran en Algérie. Alors que les protestations se poursuivent depuis la démission d'Abdelaziz Bouteflika, afin de repousser la date de l'élection présidentielle prévue le 4 juillet prochain, l'armée, principal pouvoir du pays actuellement, a fermement rejeté cette demande. En réponse, des milliers d'étudiants ont manifesté le 21 mai, au lendemain de ce refus, dans plusieurs villes du pays.
Symbole de la montée de la crispation, la police était particulièrement mobilisée lors de ces rassemblements, n'hésitant pas à faire usage de matraques ou de gaz lacrymogène, selon plusieurs journalistes présents sur place. Un spectacle éloigné des premières manifestations contre le pouvoir en février, qui se voulaient particulièrement pacifistes, au point d'être saluées par le monde entier.
Face à ces nouvelles protestations, le général Ahmed Gaïd Salah, chef d'état-major de l'armée devenu l'homme fort du pays, a demandé aux Algériens de «s'unir avec son armée», afin d'empêcher les «instigateurs de plans pernicieux de s'infiltrer dans les rangs du peuple». Une manière pour lui d'essayer de rassembler, quand sa personne est particulièrement visée par les manifestants.
Depuis sa prise de pouvoir, la situation semble en effet bloquée, attisant la frustration. Outre le déplacement de l'élection présidentielle, pour laisser le temps aux manifestants de s'organiser et trouver un candidat, «les protestataires veulent un changement profond, et surtout pas le maintien des visages du système actuel», expliquait dans nos colonnes Brahim Oumansour, chercheur à l'Iris et spécialiste de l'Algérie, quelques jours avant le départ d'Abdelaziz Bouteflika.
Une demande à laquelle Ahmed Gaïd Salah a également opposé une fin de non-recevoir à plusieurs reprises. Il a ainsi assuré qu'il serait «irraisonnable» et «dangereux» de changer toutes les personnalités actuellement au pouvoir. À six semaines des élections, l'armée va donc devoir jouer finement si elle ne veut pas risquer des débordements, toujours évités jusqu'à présent.