«Exécutions extrajudiciaires ciblées, détentions arbitraires, morts et blessures résultant d’une utilisation excessive de la force» : des crimes contre l'humanité commandités par l'administration Maduro, selon Amnesty International. Dans un rapport publié ce 14 mai, l'ONG dénonce les violences contre les opposants, alors que la situation humanitaire et politique est toujours plus difficile dans le pays.
L'ONG assure ainsi que ces crimes portant atteintes aux droits fondamentaux ont été commis en utilisant la même stratégie au fil des années, que ce soit lors des manifestations de 2014, 2017 ou 2019. Cela prouverait donc que le gouvernement était au courant, mais également qu'ils n'ont rien fait pour les endiguer.
Si ce rapport donne raison à Juan Guaido, principal opposant au gouvernement en place de Maduro, l'objectif est avant tout de rendre justice aux victimes et à leurs familles, selon Geneviève Garrigos, responsable Amériques d'Amnesty International France.
Vous pointez les crimes contre l'humanité commis par l'administration Maduro. Existe-t-il des outils pour permettre de les stopper ?
Immédiatement ? Non malheureusement. Mais ce rapport a deux objectifs majeurs. Premièrement, on envoie un signal aux familles des victimes, en leur montrant qu'elles ne sont ni oubliées ni abandonnées. Dans un deuxième temps, nous voulons lutter contre l'impunité. Après avoir étudié la situation depuis 2014, nous avons noté une escalade des violences contre les Vénézuéliens. Ces crimes contre l'humanité sont intentionnels, répétés et intensifiés. La majorité des exécutions extrajudiciaires se font par balle, par des forces gouvernementales...
Quelle est donc la priorité, selon Amnesty International ?
Nous demandons une commission d'enquête indépendante de la part du conseil des droits de l'Homme des Nations unies sur les violations qui ont été commises sur le territoire depuis 2014 jusqu'à 2019. Il est indispensable que la vérité soit faite sur ces sujets, car dans un processus visant à mettre fin à une crise, il faut prendre en compte la souffrance des victimes et de leur famille. Stopper les crimes est important, mais si des lois d'amnistie sont mises en place pour protéger les responsables, les dossiers se rouvriront plus tard, et le risque de répétitions des mêmes crises est grand.
Est-ce qu'il est envisageable de voir Nicolas Maduro devant la justice ?
Tant qu'il reste en place, cela est difficile. Nous l'avons vu au Soudan avec le président el-Béchir, il n'y a pas tellement de moyens de traduire en justice des chefs d'État s'ils ne sont pas remis à la justice par leur pays une fois qu'un mandat d'arrêt est lancé. Mais il faut tout mettre en œuvre pour que les responsables rendent des comptes.
Il y a récemment eu une tentative de soulèvement de la part de l'opposition. Est-ce que l'on doit s'attendre à une augmentation des exécutions ou des détentions arbitraires des opposants ?
La situation est très préoccupante, mais nous ne pouvons pas prédire ce qui va se passer. Ce qui est sûr, c'est que nous appelons quoi qu'il arrive au respect des droits des Vénézuéliens de la part des deux parties dans cette crise politique. Leurs droits et leur dignité doivent rester la priorité.