Kim Jong-un était attendu mardi 26 février à Hanoï après un long périple ferroviaire à travers la Chine en vue d'un deuxième tête-à-tête avec Donald Trump lourd d'enjeux au vu de la déclaration largement symbolique du précédent sommet de Singapour.
La capitale vietnamienne se préparait à accueillir mercredi et jeudi ce nouveau rendez-vous entre le dirigeant nord-coréen et le président américain qui espère arriver à la dénucléarisation du pays reclus même s'il affirme être prêt à prendre son temps.
Kim Jong-un est monté samedi à Pyongyang à bord de son train blindé vert olive frappé d'un liseré jaune pour un trajet qui l'a conduit en Chine vraisemblablement en direction du Vietnam.
Trajet top secret
Si le trajet emprunté est top secret, le convoi nord-coréen pourrait, selon des sources vietnamiennes, arriver aux première heures mardi en gare de Dong Dang, localité vietnamienne frontalière de la Chine, après 4.000 kilomètres de voyage.
De cette gare, fermée au public et encerclée par des gardes armés, le numéro un du régime pourrait gagner Hanoï par la route, dont les autorités vietnamiennes ont annoncé la fermeture mardi entre 06H00 et 14H00 locales (7H00 GMT).
En juin, M. Kim s'était engagé à «travailler vers la dénucléarisation complète de la péninsule coréenne». Mais le manque d'avancées concrètes depuis ont rendu sceptiques nombre d'observateurs.
Stephen Biegun, l'émissaire des Etats-Unis pour la Corée du Nord, a récemment reconnu que Pyongyang et Washington ne s'étaient «pas mis d'accord sur la signification» de la dénucléarisation.
Les Etats-Unis ont maintes fois réclamé que Pyongyang se débarrasse de son arsenal nucléaire de manière complète, vérifiable et irréversible.
Pour la Corée du Nord, la dénucléarisation a un sens plus large. Elle veut la levée des sanctions internationales qui l'étranglent et la fin de ce qu'elle perçoit comme les menaces américaines, à savoir la présence militaire en Corée du Sud et dans la région en général.
Donald Trump a semblé vouloir tempérer par avance les espoirs suscités par le sommet vietnamien, répétant dimanche qu'il n'était pas pressé de convaincre le Nord de renoncer à son arsenal nucléaire tant que celui-ci s'abstiendrait, comme il le fait depuis plus d'un an, de procéder à des tirs de missiles et des essais nucléaires.
«Je ne veux brusquer personne», a-t-il dit à la veille de son départ de Washington. «Tant qu'il n'y a pas de tests, nous sommes contents».
«C'est excitant»
Depuis des mois, le président américain manie la carotte et le bâton envers le Nord, faisant miroiter son potentiel économique tout en refusant l'allègement des sanctions.
«Il y a une véritable opportunité pour faire quelque chose de très très spécial. C'est excitant», a-t-il répété, avant de rappeler : «nous n'avons rien lâché, les sanctions sont toujours en place».
La Corée du Nord martèle qu'elle a déjà fait des gestes, avec le gel des essais militaires et en faisant sauter les accès à son site d'essais nucléaire.
Mais parallèlement, elle souligne qu'elle a fini de développer son arsenal et qu'elle n'a plus besoin de telles infrastructures.
Pour Harry Kazianis, du groupe de réflexion conservateur Center for the National Interest, les deux parties devront faire «au moins un pas en avant sur la dénucléarisation» car «rien ne serait pire pour chacun que de sortir de la réunion en ayant perdu son temps».
«M. Trump va certainement se focaliser plus sur un fil narratif selon lequel il a obtenu la paix plutôt que pousser M. Kim à la dénucléarisation», prédit plutôt Scott Seaman, analyste chez Eurasia Group.
Pour Kim Yong-hyun, de l'Université Dongguk, le meilleur scénario serait que les deux dirigeants se mettent d'accord sur une feuille de route pour la dénucléarisation.
Washington pourrait promettre des garanties de sécurité sous la forme d'une déclaration officielle sur la fin de la guerre de Corée (1950-53) qui s'est achevée sur un armistice.
La présidence sud-coréenne a jugé crédible un tel scénario. «Je crois qu'il existe une réelle possibilité», a dit son porte-parole Kim Eui-kyeom.
Le dirigeant nord-coréen devrait profiter de son séjour au Vietnam pour visiter des zones industrielles dans les provinces de Quang Ninh et Bac Ninh, où se trouve une usine du géant sud-coréen Samsung.
La Corée du Nord, qui a engagé discrètement depuis quelques années des réformes et où le contrôle de l'Etat s'est un peu infléchi, pourrait être intéressée par le modèle économique vietnamien, pays communiste où le gouvernement garde le contrôle total sur le pouvoir tout en bénéficiant de l'économie de marché.