Il a fini par être rattrapé par la justice. Le chanteur américain R. Kelly, accusé de multiples agressions sexuelles depuis des décennies, s'est rendu vendredi soir aux autorités après avoir été inculpé de 10 chefs d'accusation d'abus sexuel accompagné de circonstances aggravantes - trois des quatre victimes présumées étaient mineures. Sa caution a été fixée samedi à un million d'euros.
La star de R&B devra payer 10% de ce montant, soit 100.000 dollars, pour être remis en liberté.
Son avocat a aussitôt parlé de mensonges, accusant ces femmes de vouloir «tirer profit» de son client. La star du R&B de 52 ans, contre qui un mandat d'arrêt avait été émis, est arrivée dans un poste de police de Chicago dans la soirée. Elle sera présentée à un juge samedi après-midi, a indiqué dans un tweet Anthony Guglielmi, le porte-parole de la police de la grande ville de l'Illinois.
Plus tôt dans la journée, Kimberly Foxx, la procureure du comté de Cook qui englobe Chicago, ville d'origine et de résidence de R. Kelly, avait égrené lors d'une conférence de presse les chefs d'accusation retenus contre Robert Sylvester Kelly, de son vrai nom.
Des faits qui s'étalent de 1998 à 2010
Chacun des 10 chefs d'abus sexuel aggravé est passible d'une peine allant de trois à sept ans de prison. Selon la procureure, les crimes présumés s'étalent de 1998 à 2010 et concernent quatre victimes, dont trois mineures de moins de 17 ans. Une responsable du tribunal du comté de Cook, dans l'Etat de l'Illinois, a en outre indiqué à l'AFP que ces personnes mineures étaient âgées de 13 à 16 ans au moment des faits.
R. Kelly doit comparaître le 8 mars, a-t-elle précisé.
L'avocat du chanteur, Steve Greenberg, s'en est pris devant la presse aux accusatrices. «Oui, je pense que toutes ces femmes mentent», a déclaré M. Greenberg. «Tout le monde essaie d'exploiter R. Kelly (...). Malheureusement, le parquet a succombé à la pression publique.» «M. Kelly est fort, il a beaucoup de soutiens et il sera innocenté de toutes ces accusations, une par une», a-t-il lancé.
R. Kelly est accusé de crimes de ce type depuis des décennies. Il avait été inculpé en 2002 pour avoir filmé des actes sexuels entre lui et une jeune fille de 14 ans, mais finalement acquitté en 2008.
Le chanteur, une des plus grandes célébrités américaines des années 1990, a été brièvement marié, en 1994, avec la jeune star de 15 ans Aaliyah, dont les parents avaient ensuite fait annuler le mariage. La chanteuse et actrice est décédée dans un accident d'avion en 2001.
Malgré les accusations, R. Kelly a toujours semblé passer entre les gouttes et échapper à la vindicte populaire, notamment grâce à un public fidèle qui a continué de le soutenir. Dans un contexte post #MeToo, il est revenu dans la tourmente avec la diffusion en début d'année d'un documentaire le mettant en cause pour de multiples agressions sexuelles, notamment de filles de moins de 16 ans.
Une preuve vidéo
Une enquête a été ouverte à New York et la maison de disques Sony Music a mis fin au contrat qui liait sa filiale RCA à l'interprète de «I Believe I Can Fly».
La semaine dernière, le très médiatique avocat Michael Avenatti - qui défend notamment l'actrice pornographique Stormy Daniels dans le litige l'opposant au président Donald Trump - avait expliqué être en possession d'une nouvelle vidéo montrant R. Kelly ayant une relation sexuelle avec une mineure. Il avait également expliqué avoir fait suivre «cette nouvelle preuve vidéo établissant la culpabilité» du chanteur à la procureure du comté de Cook, qui a inculpé R. Kelly.
«C'est fini», a estimé M. Avenatti vendredi sur Twitter. «Après vingt-cinq ans d'abus sexuels en série et d'agressions sur filles mineures, il est temps pour R. Kelly de rendre des comptes», a ajouté celui qui dit représenter deux victimes présumées du chanteur.
Lors d'une conférence de presse, l'avocat a également indiqué avoir transmis à la procureure Foxx un deuxième enregistrement et être sur le point d'en récupérer un troisième. Michael Avenatti a aussi affirmé vouloir poursuivre les membres de l'entourage de l'artiste, qu'il considère comme complices de ce qui apparaît de plus en plus comme un système bien rôdé.
La chaîne CNN a vu la première vidéo transmise par M. Avenatti aux autorités. «On y voit un homme nu qui semble être R. Kelly avoir plusieurs rapports sexuels avec la fille», avait décrit la chaîne américaine en précisant que la jeune fille évoquait ses parties génitales en expliquant qu'elles avaient «14 ans».