Les rebelles Houthis du Yémen ont lancé jeudi 10 janvier une attaque spectaculaire de drone contre l'armée loyaliste dans le sud du Yémen, au moment où l'ONU demandait aux belligérants des progrès réels pour parvenir à la paix.
Annoncée haut et fort par les médias des insurgés, l'attaque qui fragilise le processus de paix mis en oeuvre le mois dernier sous l'égide de l'ONU a fait six tués parmi des militaires et a blessé douze autres personnes, dont des officiers et des responsables provinciaux, selon un hôpital local.
Des images filmées par un vidéaste de l'AFP ont montré un drone approchant à grande vitesse au-dessus du podium où des officiers et des responsables provinciaux avaient pris place pour suivre une parade militaire.
Le lieu de l'attaque est la base aérienne d'Al-Anad, dans la province de Lahj, la plus importante du Yémen, qui avait servi avant la guerre à l'armée américaine pour traquer les jihadistes d'Al-Qaïda.
Le drone a explosé
Certains ont cru qu'il s'agissait d'un drone venu filmer la parade. Mais, en arrivant au-dessus du podium, orné d'un portrait du président Abd Rabbo Mansour Hadi, l'engin a explosé, provoquant dans l'air une boule de feu et projetant de nombreux débris sur et autour du podium.
Un militaire blessé à l'épaule s'est laissé tomber devant le podium et un civil, muni d'un caméra et qui semblait être un reporter, a été filmé dans une mare de sang.
Des soldats paniqués ont écarté rapidement des chaises pour aller chercher leurs camarades blessés et les transporter vers des véhicules censés les emmener à l'hôpital.
«Un rassemblement d'envahisseurs et de mercenaires a été visé avec précision par un drone», a clamé sur Twitter le centre d'information d'Ansarullah, le mouvement politique des rebelles Houthis soutenus par l'Iran.
L'agence Saba qu'ils contrôlent a évoqué de «nombreux tués et blessés» parmi les militaires loyalistes.
L'attaque aurait pu décapiter la tête de l'armée du président Hadi. Etaient en effet présents le chef d'état-major de l'armée loyaliste, le général Abdallah al-Nakhi, son adjoint, Saleh Zendani, et le commandant de la 4ème zone militaire couvrant des provinces du sud, Fadel Hassan, en plus du gouverneur de la province de Lahj, Ahmed Abdallah Turki.
Selon l'hôpital Ibn Khaldoun de Houta, capitale de la province de Lahj, l'adjoint du chef d'état-major figure parmi les blessés, ainsi que le gouverneur de la province, le commandant de la 4ème zone militaire et le porte-parole de ce commandement.
Aucune information n'a pu être obtenue sur le sort du chef d'état-major lui même.
La fin de la trêve ?
L'attaque est intervenue au lendemain d'un appel de l'émissaire de l'ONU pour le Yémen Martin Griffiths qui a réclamé aux belligérants «des progrès substantiels» après les accords obtenus en décembre en Suède, alors que 80% de la population dépend toujours de l'aide humanitaire internationale.
La base d'Al-Anad a été occupée par les rebelles Houthis durant leur avancée vers le sud du Yémen en 2015, mais les forces progouvernementales, appuyées par l'Arabie saoudite, les en ont délogés la même année.
L'ONU a obtenu une percée le 13 décembre après huit jours de pourparlers en Suède entre le gouvernement Hadi et les rebelles Houthis.
Aux termes de ces accords, une trêve est en vigueur depuis le 18 décembre à Hodeida, port stratégique de l'ouest du Yémen avec un engagement d'un retrait des combattants de cette zone supervisé par une mission d'observateurs de l'ONU.
Les belligérants se sont aussi entendus pour des échanges de prisonniers, qui tarde à se concrétiser, et sur des arrangements de sécurité pour desserrer le blocus imposé à la ville de Taëz, encerclée par les rebelles dans le sud-ouest du pays.