Une série d'attentats a frappé mardi l'est de l'Afghanistan, faisant au moins trente-trois morts parmi des participants à une manifestation près de la frontière pakistanaise et devant une école pour filles.
L'attentat le plus meurtrier s'est produit à 13H00 locale (08H30 GMT), à la frontière entre l'Afghanistan et le Pakistan lorsqu'un kamikaze a fait exploser sa charge au milieu d'une foule de manifestants, à environ 70 km de la ville de Jalalabad. Les manifestants bloquaient le passage entre les deux pays pour protester contre la nomination d'un nouveau chef de la police. Au moins trente-trois personnes ont été tuées et 51 blessées, selon le porte-parole du gouverneur de la province de Nangarhar, Ataullah Khogyani.
De la chair et du sang
«Nous étions une centaine lorsque j'ai entendu une forte explosion. Puis j'ai vu de la chair et du sang, des personnes blessées tout autour de moi. Je suis à la recherche de mes amis mais je ne sais pas si ils sont vivants ou morts», a déclaré à l'AFP Gul Majid, interrogé devant l'hôpital de Jalalabad. Quelques heures plus tôt, une double attaque avait visé une école de filles dans la capitale provinciale Jalalabad, faisant un mort et quatre blessés.
Une première bombe a explosé devant l'école de filles Malika Omaira vers 08H30 locale (4H00 GMT). La seconde explosion s'est produite ensuite alors que des élèves d'une école de garçons voisine se précipitaient sur les lieux.
Aucun groupe insurgé n'a pour l'instant revendiqué ces attaques, alors que Daesh et les talibans sont actifs dans cette région de l'Afghanistan. Ces deux groupes s'opposent de longue date à l'éducation des femmes. Ils ont imposé la fermeture de nombreuses écoles de filles en Afghanistan. Le reste du pays n'a pas été épargné par la violence au cours de la semaine écoulée : les talibans ont mené de nombreuses attaques avec des troupes au sol. Daesh a de son côté revendiqué deux attentats meurtriers dans la capitale.
38 ans de guerre
Dans la nuit de dimanche à lundi, d'intenses combats ont eu lieu dans le nord de l'Afghanistan, les talibans ont tué près de soixante policiers et soldats. Trente-neuf talibans ont été tués et quatorze blessés lors de frappes aériennes de soutien, selon le gouverneur de Sar-e-Pul, Zahir Wahdat. Selon des sources locales, les forces de sécurité afghanes seraient parvenues à contenir l'avancée de talibans. Les combats n'auraient pas repris mardi matin.
Dimanche à Kaboul, un kamikaze à moto avait tué sept partisans du commandant Massoud qui célébraient le 17e anniversaire de la mort du célèbre moudjahidine ayant résisté à l'occupant soviétique, puis aux talibans. Et mercredi dernier, au moins vingt personnes, dont deux journalistes accourus sur les lieux, ont été tuées et soixante-dix autres blessées dans un double attentat revendiqué par Daesh visant la communauté chiite de Kaboul.
Ces violences aux quatre coins du pays interviennent alors que le gouvernement afghan et les Etats-Unis cherchent à pousser les talibans à s'asseoir à la table des négociations pour mettre fin à plus de 38 années de guerre ininterrompue depuis l'invasion soviétique de l'Afghanistan fin 1979. Mais les insurgés tardent à se laisser convaincre.
Daesh, dont les troupes sont bien plus réduites mais qui multiplie les attentats sanglants, est laissé à l'écart des discussions. Un premier cessez-le-feu de trois jours s'était tenu en Afghanistan mi-juin pour la fin du ramadan, suscitant d'inédites scènes de fraternisation entre soldats et talibans. Ce bref arrêt des combats, une première, avait suscité des espoirs de possibles pourparlers de paix. Mais de nouvelles attaques s'étaient produites les semaines suivantes.
Présents depuis 2001 en Afghanistan, les Etats-Unis, qui disposent de 14.000 soldats sur place et avaient jusqu'ici toujours refusé tout dialogue bilatéral avec les talibans, ont changé de stratégie et prônent «une résolution pacifique» du conflit, selon leur secrétaire d'Etat Mike Pompeo. Des représentants américains ont rencontré en juillet des talibans au Qatar. Des rumeurs font état d'un nouveau dialogue entre les deux parties ce mois-ci.
Mais mardi, une source internationale s'exprimant sous couvert d'anonymat a indiqué à l'AFP que le haut diplomate américain tout juste nommé à la tête des efforts de paix en Afghanistan, Zalmay Khalilzad, aurait décidé d'annuler tous les pourparlers, préférant dans un premier temps passer en revue la stratégie américaine en Afghanistan. L'information n'a pu être vérifiée dans l'immédiat auprès de sources officielles américaines.