Le fondateur d'un puissant réseau insurgé très actif en Afghanistan, Jalaluddin Haqqani, est décédé des suites d'une longue maladie, ont annoncé mardi les talibans dont il était un allié de longue date.
"Tout comme il a enduré de grandes épreuves pour la religion d'Allah durant sa jeunesse et alors qu'il était en bonne santé, il a également enduré une longue maladie pendant ses dernières années", selon un communiqué des talibans afghans rendu public sur Twitter. "C'est avec grand regret (...) que nous annonçons que l'estimé Al-Haj Mawlawi Jalaluddin Haqqani est décédé après une longue bataille contre la maladie", ajoute le texte.
Aucune précision n'a été apportée sur la date et le lieu de son décès mais il était suspecté de séjourner au Pakistan et d'être âgé de plus de 70 ans. Des rumeurs avaient annoncé sa mort à plusieurs reprises, dès 2008 puis en 2015, mais elle n'avait pas été confirmée par les talibans. Jalaluddin Haqqani est le fondateur dans les années 1980 du réseau éponyme, constitué pour lutter contre la présence de l'URSS en Afghanistan et qui a reçu l'aide des Etats-Unis et du Pakistan.
Ministre sous le régime des talibans dans les années 1990, Jalaluddin Haqqani s'était tourné à partir de 2001 contre les forces américaines et de l'Otan après la chute du régime fondamentaliste. Le réseau Haqqani est une faction des talibans afghans réputée proche d'Al-Qaïda qui a mené de nombreuses attaques en Afghanistan. Il est également soupçonné de liens avec Daesh responsable de sanglants attentats dans la capitale afghane, Kaboul.
Il a notamment été accusé d'un énorme attentat au camion piégé qui avait tué quelque 150 personnes en mai 2017 à Kaboul, bien que Sirajuddin, l'un des fils de Jalaluddin Haqqani, l'ait plus tard démenti dans un rare message audio. Désignés comme groupe terroriste par les États-Unis, les Haqqanis sont connus pour leur utilisation massive d'attentats-suicide à la bombe.
Le réseau a également été accusé d'assassiner de hauts responsables afghans et de procéder à des enlèvements d'Occidentaux pour obtenir des rançons.
Peu d'influence
Sa disparition, attendue, ne devrait toutefois avoir que peu d'influence sur l'évolution de la situation en Afghanistan et au Pakistan, le réseau étant aujourd'hui dirigé par son fils Sirajuddin Haqqani, estiment les experts.
"Depuis qu'il était malade et alité ces dernières années, il n'était plus en mesure de diriger le groupe et sa mort ne l'affectera en rien. Ses fils ont déjà pris la relève et dirigent les opérations", a estimé auprès de l'AFP l'analyste politique afghan Atta Noori.
"Le réseau Haqqani va rester la branche la plus meurtrière des talibans et continuer à frapper comme par le passé car leur principal objectif opérationnel est de freiner l'influence indienne et américaine en Afghanistan", a-t-il ajouté. "Je doute que son décès change quelque chose", a réagi un diplomate étranger à Kaboul sous couvert d'anonymat.
Son fils Sirajuddin dirige le réseau "avec un soutien important de l'ISI", a ajouté le diplomate, se référant à l'Inter Services Intelligence, les services secrets du Pakistan.
Longtemps soupçonné d'être lié à l'establishment militaire de l'ombre du Pakistan, le réseau Haqqani avait été décrit dès 2011 par l'amiral américain Mike Mullen comme un "véritable bras armé" du renseignement pakistanais.
Les Etats-Unis ont annoncé dimanche qu'ils voulaient annuler 300 millions de dollars d'assistance sécuritaire au Pakistan, exaspérés par son soutien présumé à des groupes extrémistes.
Le sujet sera au menu de la visite du secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo prévue cette semaine au Pakistan, au cours de laquelle il rencontrera son nouvel homologue pakistanais Shah Mehmood Qureshi.