«Un double coup de massue» : la faible augmentation des pensions de retraite prévue en 2019 et 2020 par le gouvernement pour faire des économies fait grincer des dents les retraités, déjà très remontés contre la hausse de la CSG.
Dans une interview accordée dimanche au JDD, le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé que les pensions de retraites, comme les allocations familiales et les aides personnalisées au logement (APL), ne seraient pas indexées sur l'inflation mais «progresseraient de façon plus modérée, de 0,3 % par an en 2019 et en 2020» pour «maîtriser les dépenses publiques».
«Après la hausse de la CSG, on peut dire que c'est un double coup de massue pour les retraités», réagit lundi auprès de l'AFP Michel Salingue, secrétaire général de la Fédération générale des retraités de la fonction publique, trouvant la mesure «un peu dure à avaler».
Pour lui, ce sont «les 16 millions de retraités qui vont voir leur pouvoir d'achat baisser de manière considérable».
Cet ancien instituteur, qui touche 2.000 euros mensuels de pension, a sorti sa calculette : «Si on ajoute la hausse de 1,7 point de CSG à une inflation estimée pour 2019 à 1,6% et qu'on enlève la petite revalorisation prévue de 0,3%, on obtient une perte de 3%, donc 60 euros par mois, 720 euros par an».
«Pour moi, ça va toucher des choses qui ne sont pas essentielles, comme des vacances, des sorties, mais certainement pas les cadeaux aux petits-enfants», poursuit-il. «En revanche, pour des personnes qui ont moins de retraite, ça va taper directement dans les dépenses du quotidien».
En France, secteurs privé et public confondus, on estime la retraite moyenne à 1.300 euros net par mois, en incluant les complémentaires.
«Assommer» les retraités
«Cette mesure, c'est juste la continuité de la politique de ce gouvernement», déplore auprès de l'AFP Francisco Garcia, président de l'Union nationale des retraités et personnes âgées (UNRPA), estimant qu'«on méprise les retraités».
Au cours des derniers mois, les fédérations de retraités et organisations syndicales sont plusieurs fois descendues dans la rue pour critiquer, d'abord, le report d'octobre 2018 à janvier 2019 de l'indexation des pensions de retraite (mesure de la Loi de finances de la Sécurité sociale 2018), puis la hausse de 1,7 point de CSG, qui touche depuis le 1er janvier 60% des retraités, soit 7,5 millions de personnes.
Dans un communiqué, l'Union confédérale des retraités CGT a appelé lundi à une grande journée de mobilisation intersyndicale, le 9 octobre, pour dénoncer l'indexation des pensions de retraites «au bon vouloir du gouvernement».
Dans tous les rangs de l'opposition, la mesure a également été vivement critiquée. A droite, le vice-président de LR, Jean Leonetti, a déploré «un très mauvais choix» du gouvernement.
A gauche, l'ancien ministre de l'Economie de François Hollande, Michel Sapin, a estimé qu'on allait «assommer les retraités».
Emmanuel Macron «a déjà demandé des sacrifices considérables à nos retraités (...) aujourd'hui ils vont être à nouveau durement frappés», a également critiqué l'eurodéputé du Rassemblement national (RN, ex-FN), Nicolas Bay.
Invité lundi matin sur RTL, le ministre de l'Economie Bruno le Maire a martelé que les retraités «ne seront pas perdants». «Leur pension de retraite sera revalorisée moins vite mais elle continuera à être revalorisée (...) Nous ne leur prenons pas d'argent», a-t-il justifié.
«C'est nous prendre pour des imbéciles que de dire cela», réagit M. Salingue. «Bien sûr, mathématiquement, les retraites ne baisseront pas, mais comparativement aux prix à la consommation, le niveau de vie va baisser, c'est indéniable».
En pleine consultation pour une réforme des retraites, prévue pour 2019, il voit dans les arbitrages budgétaires «un très mauvais signe», craignant «la fin de la revalorisation systématique des pensions de retraite».