Le nouveau Premier ministre du Pakistan Imran Khan a prêté serment lors d’une cérémonie samedi à Islamabad, ouvrant une nouvelle ère politique pour le pays et promettant de lutter contre la corruption et la pauvreté.
L'ex-champion de cricket, visiblement ému et butant à l'occasion sur les mots, a solennellement pris l’engagement de «faire preuve d'une foi sincère et de fidélité au Pakistan» et d'agir «toujours dans l’intérêt de la souveraineté, de l’intégrité» du pays.
M. Khan, 65 ans, avait été élu la veille par l’Assemblée nationale. Devenu ainsi le 22e Premier ministre du pays, il prendra la tête d’un gouvernement de coalition.
L'ancien champion avait obtenu les voix de 176 députés, soit 4 de plus que nécessaire, tandis que son unique rival, Shahbaz Sharif, chef de file du PML-N (Ligue musulmane pakistanaise), l'ancien parti au pouvoir, n’en avait réuni que 96.
La cérémonie s’est déroulée au palais présidentiel devant un large parterre de dignitaires pakistanais et étrangers dont des diplomates, artistes et militaires.
Toute l'équipe de cricket pakistanaise championne du monde en 1992 sous le capitanat d'Imran Khan, ainsi que quelques joueurs indiens, y avaient été conviés.
La nouvelle Première Dame du Pakistan, Bushra Bibi, couverte d'un niqab blanc ne laissant voir que ses yeux, a fait sa première apparition publique depuis leur mariage au début de l'année.
Le parti de M. Khan, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI), avait largement remporté les législatives du 25 juillet. Mais il n'avait pas obtenu assez de sièges pour pouvoir former à lui seul le gouvernement.
Depuis le scrutin, les négociations avec d'autres partis et élus indépendants ont permis de mettre sur pied une coalition.
La victoire de M. Khan ouvre une nouvelle ère politique pour le pays, interrompant des décennies d'alternance politique entre le PML-N et le Parti du peuple pakistanais (PPP), entrecoupée de périodes de pouvoir militaire.
Le Pakistan, né de la partition de l'Inde coloniale britannique et qui a soufflé cette semaine ses 71 bougies, a été dirigé par l'armée pendant près de la moitié de son histoire mouvementée.
L'ex-champion a promis l'avènement d'un «nouveau Pakistan» et s'est engagé à lutter frontalement contre la corruption et la pauvreté.
«Apporter le changement»
Dans un discours prononcé vendredi peu après son élection, M. Khan avait promis, l'air combattif, «d'apporter le changement dont cette nation avait tant besoin».
«Pour commencer, nous allons rendre les gens strictement responsables de leurs actes. Je m'engage devant Dieu à ce que quiconque a pillé ce pays en soit tenu responsable», a-t-il lancé.
Il a aussi implicitement balayé les nombreuses accusations d'interférence de l'armée en sa faveur pendant la campagne électorale. «Je suis ici après 22 ans de combats, aucun dictateur ne m'a pris en charge», a-t-il affirmé.
Il a promis de «coopérer» face aux accusations de fraudes aux élections de juillet avancées par une grande partie de l'opposition, à commencer par le PML-N. L'ancien parti au pouvoir s'estime depuis des mois victime de persécution. Son ancien leader, l'ex-Premier ministre Nawaz Sharif, a été emprisonné pour corruption deux semaines avant les élections.
M. Khan est idolâtré par des millions de Pakistanais pour avoir mené l'équipe nationale de cricket, sport roi dans le pays, à sa seule victoire en Coupe du monde en 1992.
Connu en Occident comme un ancien sportif d'exception aux nombreuses conquêtes, il présente aujourd'hui un visage beaucoup plus conservateur au Pakistan, où il s'affiche souvent un chapelet à la main.
Parmi les principaux défis qui attendent le gouvernement Khan figurent la situation sécuritaire du pays, en amélioration mais toujours précaire dans certaines zones et une population en pleine expansion.
Il fera aussi face à une situation économique dégradée, qui pourrait le contraindre à requérir très rapidement un prêt du Fonds monétaire international (FMI), et à d'énormes problèmes de ressources en eau.
Enfin, et bien que M. Khan semble actuellement entretenir de bonnes relations avec les généraux, il pourrait comme nombre de ses prédécesseurs se retrouver à terme en conflit avec eux sur les questions de défense et de politique étrangère, qu'ils sont réputés contrôler.