Bus et rues vides, magasins fermés : le Nicaragua se réveille vendredi paralysé par une grève générale décrétée par l'opposition pour exiger le départ du président Daniel Ortega lequel, en réponse, mobilise ses partisans pour marcher sur Masaya, la ville la plus rebelle du pays.
Sur les réseaux sociaux, on pouvait voir des images des rues et des bus vides ainsi que des magasins et centres commerciaux fermés.
Cette deuxième grève générale de 24H a débuté dans la nuit de jeudi à vendredi, à 00H00 locales (06H00 GMT), à l'appel de l'Alliance civique pour la démocratie et la justice, coalition de l'opposition qui inclut des secteurs de la société civile. Un premier mouvement social identique avait bloqué le pays le 14 juin.
«Vidons les rues pour montrer que nous ne voulons plus de répression et que nous voulons qu'ils s'en aillent», a lancé l'opposition au début de la mobilisation en référence au couple présidentiel Daniel Ortega et son épouse Rosario Murillo, également vice-présidente.
La grève s'inscrit dans une série d'actions sur trois jours lancée par le camp anti-Ortega pour renforcer la pression sur le gouvernement.
La veille, une marée bleu et blanc, les couleurs du Nicaragua, a envahi les rues de la capitale et d'autres villes. Des affrontements durant une marche à Morrito, dans le sud-est du pays, ont fait cinq morts : quatre policiers et un manifestant.
Samedi, un convoi d'opposants en véhicules doit parcourir les quartiers est de la capitale, où la police et les groupes paramilitaires ont réalisé de violentes opérations pour démonter les barricades des manifestants.
Les adversaires d'Ortega demandent justice, des élections anticipées ou le départ du président, accusé d'avoir durement réprimé les manifestations et mis en place avec son épouse une «dictature» marquée par la corruption et le népotisme.
Le pays le plus pauvre d'Amérique centrale est secoué par des manifestations d'une ampleur historique contre Daniel Ortega, ex-guérillero de 72 ans au pouvoir depuis 2007 après l'avoir déjà été de 1979 à 1990. On dénombre plus de 264 morts depuis le 18 avril, selon la Commission interaméricaine des droits de l'Homme (CIDH).
«Marche vers la victoire»
En pleine grève générale, le chef de l'Etat de gauche doit prendre vendredi la tête d'une marche en mémoire de la révolution sandiniste de 1979, vendredi vers Masaya à une trentaine de kilomètres de Managua.
Le «repli», du nom de cet épisode historique, a eu lieu le 27 juin 1979 : des milliers de guérilleros de Managua s'étaient alors repliés à Masaya pour rassembler leurs forces avant de renverser le dictateur Anastasio Somoza.
«Tous les marcheurs de la paix, de l'avenir, de l'amour, à (la marche du) repli avec Daniel (...) car nous sommes en train de faire gagner la paix», a déclaré Rosario Murillo en mobilisant les fidèles du Front sandiniste de libération nationale (FSLN, gauche), le parti au pouvoir. «La marche vers la victoire ne s'arrête pas», a ajouté Murillo.
Masaya, le quartier indigène de Monimbo, était en alerte. «Non au repli», «on ne se rendra jamais», «Monimbo résiste aujourd'hui, demain et toujours», pouvait-on lire sur les murs et les barricades.
Face à l'aggravation de la situation, l'Organisation des Etats américains (OEA) a convoqué une session extraordinaire vendredi sur le Nicaragua.
Très influente au Nicaragua, l’Église catholique joue le rôle de médiatrice entre le gouvernement et l'opposition, en demandant notamment des élections anticipées, mais sans succès : le président Ortega a rejeté samedi cette éventualité.
Le week-end dernier, 14 personnes sont mortes à la suite de violents raids des forces de l'ordre dans les villes de Diriamba et Jinotepe, dans le sud-ouest du pays.