Des frappes ont visé jeudi des positions rebelles près de Hodeida, au deuxième jour d'une offensive pour reprendre cette ville portuaire clé au Yémen, les alliés du pouvoir tentant d'atténuer les craintes sur une interruption de l'aide humanitaire.
La question de l'aide préoccupe la communauté internationale et sera au centre d'une réunion jeudi du Conseil de sécurité de l'ONU qui craint que l'offensive en cours aggrave une crise humanitaire dans le pays en guerre, déjà qualifiée de la «pire au monde» par les Nations unies.
La Russie a appelé à la suspension des hostilités. «Si les combats dans cette zone causent l'interruption de l'aide alimentaire, les civils, qui font déjà face à de nombreuses privations, pourraient se retrouver au bord de la mort», a prévenu Moscou.
Dans cette guerre qui a fait près de 10.000 morts en plus de trois ans, une coalition dirigée par l'Arabie saoudite est intervenue au Yémen en mars 2015 pour aider le pouvoir du président Abd Rabbo Mansour Hadi à stopper la progression des rebelles Houthis qui ont occupé de vastes régions dont la capitale Sanaa.
La bataille de Hodeida est la plus importante depuis une offensive à l'été 2015 qui avait permis aux forces progouvernementales de reprendre aux rebelles plusieurs régions du sud du pays dont Aden, la deuxième ville du pays et siège actuel du pouvoir.
Sur le terrain, des raids aériens menées par la coalition ont visé jeudi des positions des rebelles près de Hodeida, ont indiqué les médias des insurgés alors que les forces progouvernementales se trouvent aux abords de l'aéroport situé au sud de la ville portuaire.
Selon l'agence officielle saoudienne, les forces loyalistes ont réussi à «libérer des zones stratégiques dans le secteur d'Al-Douraïhimi et les environs de l'aéroport après avoir enfoncé les lignes rebelles».
Le grand port de Hodeida, sur la mer Rouge, constitue un enjeu stratégique, étant le point d'entrée d'une bonne partie des importations et de l'aide humanitaire en territoire yéménite.
Assurer l'acheminement de l'aide
Le port reste ouvert en dépit de l'assaut, a indiqué à l'AFP le directeur Daoud Fadhel.
«Nous avons sept navires à quai et l'activité est normale alors que cinq autres navires attendent au large pour pouvoir entrer au port», a-t-il déclaré par téléphone à l'AFP.
Avant une réunion du Conseil de sécurité à l'initiative du Royaume-Uni qui a demandé à ce qu'elle se tienne à huis clos à midi (16H00 GMT), les deux piliers de la coalition anti-insurgés -l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis-, ont tenté d'apaiser les craintes sur l'aide humanitaire.
Ils ont affirmé mercredi soir à Ryad avoir pris des dispositions pour assurer la continuité du flot de ces aides en dépit de l'opération militaire.
Des «ponts aérien, maritime, et terrestre» ont été prévues pour assurer l'acheminement de cette aide, ont-ils expliqué lors d'une conférence de presse conjointe d'Abdallah al-Rabeeah qui dirige le Centre roi Salmane d'aide et de secours et Rim al-Hachémi, ministre d'Etat émiratie à la Coopération internationale.
Appel britannique
La réunion du Conseil de sécurité se tient à la demande de la Grande-Bretagne, dont le chef de la diplomatie a demandé la protection des civils.
«J'appelle toutes les parties à respecter le droit humanitaire international et à faire de la protection des civils une priorité», a déclaré mercredi dans un communiqué le ministre britannique des Affaires étrangères Boris Johnson, après le début de l'assaut contre Hodeida.
L'émissaire de l'ONU pour le Yémen, Martin Griffiths, a lui appelé à la retenue en soulignant être en contact avec «toutes les parties concernées pour négocier des arrangements».
Il a reçu le «soutien vigoureux» du secrétaire américain à la Défense, Jim Mattis, pour qu'il amène «à la table négociations toutes les parties du conflit», selon le porte-parole du Pentagone, Adrian Rankine-Galloway.
«Nous maintenons que le port de Hodeida est crucial pour la fourniture de l'aide humanitaire» aux Yéménites, a-t-il ajouté.
Mercredi, une quinzaine d'ONG internationales ont estimé que l'assaut «aurait probablement des conséquences catastrophiques sur la population civile», dans une lettre au président français Emmanuel Macron. Elles ont dans ce contexte jugé «inconcevable» de maintenir une conférence humanitaire sur le Yémen prévue fin juin à Paris.
Mais Paris a réaffirmé son souhait d’organiser cette conférence.