Donald Trump a affiché lundi son optimisme, et une forme d'impatience, à la veille de son sommet très attendu avec Kim Jong-un sur la dénucléarisation de la Corée du Nord.
Les regards du monde entier sont tournés vers Singapour avec une même interrogation : le président américain, 71 ans, qui a accepté à la surprise générale de rencontrer l'héritier de la dynastie des Kim, de plus de trente ans son cadet, réussira-t-il là où tous ses prédécesseurs ont échoué ?
«Heureux d'être à Singapour, excitation dans l'air !», a tweeté le président qui sort d'un G7 au Canada qui a tourné au fiasco après sa spectaculaire volte-face qui a provoqué de très vives tensions avec les alliés historiques des Etats-Unis.
«Je pense que cela va très bien se passer», a-t-il ajouté peu après, à l'occasion d'un déjeuner de travail avec le Premier ministre singapourien Lee Hsien Loong.
Personnage central des négociations en cours, le chef de diplomatie américaine, Mike Pompeo, qui a rencontré à deux reprises Kim Jong-un à Pyongyang, a de son côté évoqué des rencontres «substantielles et détaillées», à J-1, entre les délégations des deux pays ennemis.
Le tête-à-tête entre les deux hommes, absolument inimaginable il y a quelques mois lorsqu'ils étaient engagés dans une surenchère verbale faisant craindre le pire, est prévu mardi matin dans un hôtel de luxe de la cité-Etat asiatique.
Le sommet, qui offre une visibilité internationale au leader d'un régime cloîtré dont les déplacements à l'étranger se comptent sur les doigts d'une main, est déjà vu comme une concession de taille de la part des Etats-Unis.
«Cela fait 25 ans que la Corée du Nord essaie d'obtenir une rencontre avec un président américain en exercice», explique à l'AFP Boris Toucas, chercheur invité au Center for Strategic and International Studies à Washington.
«Ere nouvelle»
En jeu, les ambitions atomiques de Pyongyang, sous le coup de sanctions internationales draconiennes imposées au fil des années et des crises par le Conseil de sécurité de l'ONU.
«Nous restons déterminés à parvenir à la dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la péninsule coréenne», a martelé M. Pompeo dans un tweet.
Dans un compte-rendu du déplacement de l'homme fort de Pyongyang, l'agence nord-coréenne KCNA a évoqué l'avènement d'une «ère nouvelle», confirmant que la dénucléarisation mais aussi «un mécanisme de maintien de la paix permanent et durable dans la péninsule coréenne» seraient au menu du sommet.
Un haut responsable américain a vu dans cette formulation «un message d'optimisme».
Mais l'exigence américaine bute depuis des années sur la résistance opiniâtre des Nord-Coréens.
En 1994 puis en 2005, des accords avaient été conclus mais aucun d'entre eux n'a jamais été réellement appliqué, et la Corée du Nord a multiplié depuis 2006 les essais nucléaires et balistiques, jusqu'à la dangereuse escalade de l'an dernier.
En rencontrant Kim, Trump mise sur son instinct et ses talents autoproclamés de négociateur hors pair. Mais alors que son administration laissait miroiter un accord historique le 12 juin, elle s'est dernièrement évertuée à faire retomber les attentes, évoquant le début d'un «processus» inédit.
Rafales de tweets sur le G7
Les protagonistes sont certes nouveaux, y compris le président sud-coréen Moon Jae-in, très investi dans un rapprochement avec le Nord.
Mais les ingrédients d'un éventuel accord sont, à de nombreux égards, les mêmes que par le passé: une dénucléarisation progressive en échange d'un soutien économique, des garanties de sécurité pour le régime reclus et un traité de paix mettant formellement fin à la guerre de Corée (1950-53).
«Trump a simplement offert ces rencontres aux Nord-Coréens sans obtenir aucune avancée», déplore l'expert Jeffrey Lewis dans Foreign Policy. «Il paraît évident depuis le début que la Corée du Nord n'a pas l'intention d'abandonner son arsenal nucléaire.»
Alors que l'homme d'affaires républicain a assuré ne pas avoir vraiment besoin de se préparer pour le sommet, son équipe tente de donner l'image d'un président concentré et studieux.
Mais il a consacré sa salve de tweets matinale aux vives tensions avec l'Europe et le Canada à l'issue d'un G7 qui a viré au fiasco, sur fond de guerre commerciale entre Washington et ses alliés.