Les ministres des finances du G7 se réunissent à partir de jeudi au Canada dans un contexte de vives tensions commerciales, le jour même où les Etats-Unis sont appelés à clarifier leur position sur l'imposition ou non de taxes sur les importations européennes d'acier et d'aluminium.
La nervosité est d'autant plus palpable du côté européen que l'Italie traverse une crise politique sans précédent qui pourrait avoir des répercussions bien au-delà des frontières transalpines. Troisième économie de la zone euro, ce pays d'Europe du Sud attend en effet toujours la formation d'un gouvernement. Et ce climat d'incertitudes tire les marchés à la baisse.
Les réunions du groupe des sept que forment l'Allemagne, le Canada, les Etats-Unis, la France, l'Italie, le Japon et le Royaume-Uni (G7) sont traditionnellement l'occasion de discuter de l'évolution de la croissance et des risques entourant l'économie de la planète.
Le G7, qui se tient de jeudi à samedi à Whistler, une station de ski canadienne située au nord de Vancouver (ouest), va se dérouler «dans un contexte compliqué et tendu», résume-t-on côté français à Bercy.
En effet, le premier jour de cette réunion coïncide avec la fin de l'exemption des taxes de 25% sur l'acier et de 10% sur l’aluminium accordée temporairement à l'Union européenne (UE) par Washington.
Selon le Wall Street Journal mercredi soir, l’administration américaine s'apprêterait à annoncer l'application de ces tarifs douaniers sur les importations d'acier et d'aluminium européens dès jeudi. Le journal qui cite des sources proches du dossier affirme que l'administration Trump est prête à laisser expirer la période d'exemption accordée en mars. Un accord de dernière minute est encore possible quoique peu probable, ont indiqué ces sources au quotidien.
Les Etats-Unis, qui reprochent aux 28 pays membres de l'UE de ne pas ouvrir suffisamment leur marché aux marchandises américaines, importent 51,3% d'aluminium et 35,8% d'acier à partir de leurs partenaires du G7, selon des données du département américain du commerce de 2017.
«Nous attendons une décision américaine sur l'exemption temporaire sur les tarifs qui arrive à échéance le 31 mai (jeudi) à minuit», a rappelé Bercy.
La commissaire européenne au commerce Cecilia Malmström s'attend au mieux à ce que Washington impose des quotas d'importations.
Face aux Américains, les Européens tâchent de rester unis, prônant le multilatéralisme. Une position que le secrétaire américain au commerce Wilbur Ross a balayé d'un revers de la main mercredi, martelant que l'administration Trump privilégiait les relations «bilatérales».
«Palabres infinies»
«Nous n'aimons pas les palabres infinies, nous préférons les actions bilatérales pour négocier. Les réunions multilatérales prennent beaucoup de temps et nous sommes animés d'un sentiment », a-t-il affirmé lors d'une table-ronde de l'OCDE à Paris où le protectionnisme américain était au coeur des discussions.
A Whistler, l'Allemagne insistera sur le fait que le conflit commercial pourrait compromettre la reprise économique mondiale, a expliqué une source gouvernementale allemande.
Un point de vue partagé par le Fonds monétaire international (FMI) et sa directrice générale, également présente au G7. Christine Lagarde met en garde depuis des mois contre une potentielle guerre commerciale qui pourrait faire «dérailler» l'économie qui a tant peiné à redécoller après la crise financière planétaire de 2008.
Au Canada, les Européens auront probablement le soutien du Japon, qui, lui, est déjà frappé par les tarifs sur l'acier et l'aluminium, promulgués début mars par le président américain Donald Trump au nom de la protection de la sécurité nationale.
Washington devra également sans doute répondre aux interrogations sur les fluctuations de sa politique commerciale vis-à-vis de la Chine. Après avoir annoncé conjointement avec Pékin, le 19 mai, une trêve dans leur guerre commerciale, l'administration Trump est repartie à l'offensive mardi.
La Maison Blanche a en effet annoncé la poursuite de son plan pour imposer des droits de douanes supplémentaires de 25% sur 50 milliards de dollars d'importations chinoises annuelles «contenant des technologies importantes».
Elle prépare en outre des mesures destinées à restreindre les investissements chinois et à limiter les exportations de technologies américaines vers le géant asiatique.
«Volte-face»
Mercredi, Pékin a dénoncé le «volte-face» de son partenaire américain, interprété comme une volonté de redoubler la pression quelques jours avant la visite de Wilbur Ross en Chine où il doit poursuivre les négociations avec l'objectif de conclure un accord après des décisions de principe annoncées le 19 mai.
«La Chine ne souhaite pas une guerre commerciale mais n'a pas peur d'en mener une», a prévenu la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Hua Chunying.
Les ministres canadiens pourraient quant, à eux, adopter un profil bas pour ne pas froisser leur partenaire américain qui menace de se retirer du traité de libre-échange nord-américain (Aléna).