Le président sud-coréen Moon Jae-in et le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un se retrouveront vendredi avant leur sommet historique sur la Ligne de démarcation militaire qui divise la péninsule, un événement qui promet d'être hautement symbolique.
Quand M. Kim franchira cette ligne, il deviendra le premier dirigeant nord-coréen à fouler le sol sud-coréen depuis la fin de la Guerre de Corée il y a soixante-cinq ans.
Auparavant, M. Moon accueillera son visiteur sur la ligne en béton qui marque la frontière entre les deux Corées dans la Zone démilitarisée, a annoncé le directeur du secrétariat de la présidence sud-coréenne Im Jong-seok.
Ce sommet sera seulement le troisième du genre, après deux réunions intercoréennes à Pyongyang en 2000 et 2007, et résulte de l'effervescence diplomatique qui s'est emparée ces derniers mois de la péninsule. La réunion doit être le précurseur d'un autre face-à-face historique très attendu, entre M. Kim et le président américain Donald Trump.
La question de l'arsenal nucléaire nord-coréen devrait figurer parmi les sujets prioritaires.
Depuis son arrivée au pouvoir fin 2011 au décès de son père, M. Kim a présidé à une accélération fulgurante des programmes nucléaire et balistique nord-coréens, les tensions sur la péninsule atteignant des sommets. En 2017, Pyongyang a mené son essai nucléaire le plus puissant à ce jour et testé des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) mettant à sa portée le territoire continental des Etats-Unis.
Mais depuis que Kim Jong-un a annoncé le 1er janvier, à la surprise générale, la participation de son pays aux jeux Olympiques d'hiver de Pyeongchang, au Sud, un rapprochement spectaculaire s'est opéré.
Un sommet qui s'annonce difficile
M. Im a toutefois prévenu que rien ne serait aisé : «Parvenir à un accord sur la dénucléarisation au moment où les programmes nucléaire et d'ICBM nord-coréens ont considérablement avancé sera différent par nature des accords de dénucléarisation conclus dans les années 1990 et au début des années 2000».
«C'est ce qui rend ce sommet particulièrement difficile», a-t-il poursuivi. «Le plus délicat sera de voir à quel niveau les deux dirigeants seront capables de s'accorder sur la volonté de dénucléarisation» du Nord et comment «ceci sera couché sur le papier».
Dans le passé, le concept de «dénucléarisation de la péninsule» a pu signifier pour Pyongyang le départ des 28.500 militaires américains stationnés au Sud et le retrait du parapluie nucléaire américain, toutes choses impensables pour Washington.
D'après Séoul, les deux dirigeants pourraient aussi aborder la question d'un traité de paix pour mettre formellement un terme à la Guerre de 1950-1953. Le conflit s'était achevé sur un simple armistice si bien que les deux pays sont toujours techniquement en guerre. La reprise des réunions de familles divisées par la guerre pourrait également être discutée.
M. Moon a fait savoir au Premier ministre japonais Shinzo Abe qu'il évoquerait le problème de ses ressortissants enlevés par des agents nord-coréens dans le but de former les espions de Pyongyang, question très sensible à Tokyo.
Après s'être retrouvés, les deux dirigeants iront à pied vendredi jusqu'à la Maison de la paix, une structure de verre et de béton située du côté sud du village de Panmunjom, où fut signé l'armistice. Avant la séance du matin, le dirigeant nord-coréen signera le livre d'or, a précisé M. Im.
Les deux délégations déjeuneront chacune de leur côté, les Nord-Coréens franchissant la frontière dans l'autre sens pour leur collation.
Symbole de paix et communiqué conjoint
Avant la séance de l'après-midi, MM. Kim et Moon planteront un pin. Cet arbre «représentera la paix et la prospérité sur la Ligne de démarcation militaire, qui est le symbole de la confrontation et de la division depuis soixante-cinq ans», a ajouté M. Im. La terre viendra du Mont Paektu, endroit sacré aux yeux des Nord-Coréens, et du Mont Halla, sur l'île sud-coréenne de Jeju.
Après la signature d'un accord, un communiqué conjoint devrait être publié. «Nous pourrions l'appeler 'Déclaration de Panmunjom'», a ajouté le haut responsable.
La délégation nord-coréenne comprendra la soeur du maître de Pyongyang, Kim Yo Jong, l'une de ses plus proches conseillères, qu'il avait déjà dépêchée au Sud pour les JO d'hiver, selon M. Im. Kim Yong Nam, le chef de l'Etat nord-coréen aux fonctions largement honorifiques, sera également de la partie. «Contrairement à ce qui s'est produit dans le passé, la délégation comprend de hauts responsables militaires et diplomatiques», a souligné M. Im.
«Nous ne nous y attendions pas. Nous pensons que cela veut dire que la Corée du Nord voit cela non seulement comme un sommet Nord/Sud mais dans la perspective d'un sommet avec Washington».