Le mouvement, porté par la jeunesse, presse les autorités américaines d’agir, pour mettre enfin un terme aux tueries.
«Plus jamais ça.» Avec pour seul arsenal des pancartes, des slogans et des T-shirts, des dizaines de milliers de personnes sont attendues, demain, à Washington, mais aussi à New York ou Boston, pour réclamer au gouvernement américain un renforcement de la législation sur les armes à feu. Ce large mouvement, baptisé «March For Our Lives» (La marche pour nos vies), est une réponse à la tuerie du lycée de Parkland, le 14 février, où 17 adolescents avaient été abattus. Une tragédie qui illustre un fléau profond : aux Etats-Unis, une fusillade de masse a lieu quasiment deux jours sur trois.
Une marche inédite
Las Vegas, Orlando, Virginia Tech ou encore Sandy Hook… Aucune tuerie n’avait provoqué, par le passé, une telle mobilisation des citoyens américains, lesquels paraissaient résignés. Mais, aujourd’hui, les Etats-Unis semblent être à un «tournant» sur ce sujet, comme l’ont fait remarquer de nombreux médias nationaux. Le mouvement ne réunit en effet pas seulement les habituels militants anti-armes à feu, puisque c’est la jeunesse qui est désormais en tête du cortège. Preuve en est, de nombreux bus ont été affrétés pour que des adolescents de tout le pays rejoignent Washington. Une vague soutenue par de nombreuses personnalités, comme Miley Cyrus, Reese Whitherspoon ou encore Kim Kardashian, et qui espère réussir là où le parti démocrate a échoué. Ce dernier avait notamment réalisé un sit-in au Congrès, après la fusillade dans une boîte gay d’Orlando en juin 2016. En vain. Même l’ancien président Barack Obama qui, les larmes aux yeux, avait annoncé une série de mesures pour réformer le contrôle des armes, s’était heurté à un mur.
La jeunesse a donc décidé de se battre avec les outils de sa génération «en diffusant, de manière spontanée, des messages sur les réseaux sociaux», explique Jean-Eric Branaa, spécialiste des Etats-Unis. Parmi les actes fondateurs : le puissant discours d’Emma Gonzalez, survivante de la fusillade du lycée de Parkland, qui a ainsi été largement partagé sur Twitter après sa diffusion à la télévision. Ce combat, nouveau, en rappelle un autre. «En 1968, une mobilisation similaire était partie de la jeunesse américaine, contre la guerre du Vietnam», souligne ainsi Jean-Eric Branaa.
Des limites persistantes
Le mouvement a cependant peu de chances d’avoir une incidence à court terme. Premier obstacle sur la route des anti-armes à feu, la puissante National Rifle Association (NRA), qui, depuis les années 1970, pèse fortement dans la vie politique américaine. Le lobby pro-armes fait, en effet, pression sur les membres du Congrès en finançant, grâce à des dizaines de millions de dollars, les campagnes électorales. De plus, la population américaine reste très attachée au droit de porter une arme, inscrit dans la Constitution. Or, il faudrait l’aval des deux tiers des deux Chambres, et ce dans les trois quarts des Etats, pour modifier ce texte. Un héritage culturel défendu avec force par Donald Trump depuis son élection, en novembre 2016. Mais la jeune génération semble décidée à mener le combat, et pourrait même le poursuivre dans les années à venir… sur le terrain politique.