Les sénateurs devraient suspendre vendredi l’autonomie de la région catalane, qui veut faire sécession. Un choix aux conséquences encore imprévisibles.
Un point de non-retour. Après trois semaines d’une fièvre indépendantiste sans précédent en Catalogne, le Sénat espagnol devrait voter vendredi la suspension de l’autonomie de la région, à la demande du gouvernement de Mariano Rajoy. Aucune sortie de crise n’a en effet été trouvée avec la région, dont le Parlement s’est réuni ce jeudi soir.
Dans les heures qui viennent, les membres de l’exécutif catalan devraient donc être limogés, et leurs prérogatives remises aux ministères nationaux. Le président, Carles Puigdemont, n’aura plus aucun pouvoir, tandis que la presse et le Parlement locaux seront mis sous tutelle. Le dénouement d’une crise politique qui ne laissera pas l’Espagne indemne.
Deux parties irréconciliables
Les proches de Carles Puigdemont ont fait pression sur lui jusqu’à la dernière minute, ce jeudi, pour qu’il convoque lui-même des élections. En remettant son mandat en jeu, il pouvait espérer que Madrid renonce à suspendre l’autonomie. Mais le président catalan n’a pas obtenu «les garanties suffisantes» pour suivre cette voie, a-t-il déclaré, renvoyant au Parlement régional la responsabilité de la «réponse» à apporter à la tutelle décidée par Madrid.
L’assemblée catalane délibérait encore tard ce soir, certains députés séparatistes envisageant le vote d’une déclaration officielle d’indépendance. Une option qui ne ferait que renforcer la détermination de Madrid à prendre le contrôle de la région. C’est «la seule réponse possible», avait en effet insisté, plus tôt, Mariano Rajoy.
«Le seul dialogue que j’ai eu avec Carles Puigdemont, la seule chose qu’il a voulu négocier avec moi, ce sont les termes et les délais de l’indépendance», avait-il ensuite déploré. Résultat, l’Espagne s’apprête à recourir, pour la première fois depuis le retour à la démocratie en 1977, à l’article 155 de sa Constitution, qui permet de suspendre l’autonomie d’une région en cas de menace sur l’intégrité nationale.
Un climat explosif
Le caractère inédit de cette situation rend la suite des événements imprévisible. Rien ne permet de garantir que les Catalans se plieront à la décision probable de Madrid. Au cours de la semaine, des structures séparatistes ont menacé d’organiser des opérations de désobéissance civile en cas de mise sous tutelle. Les pompiers catalans et les Mossos d’Esquadra, la police locale, pourraient ne pas reconnaître l’autorité des institutions centrales.
D’autant que des milliers de personnes s’étaient rassemblées ce jeudi dans les rues de Barcelone pour protester contre l’article 155 et réclamer l’indépendance. Une mobilisation qui donne l’impression d’une population catalane plus déterminée que jamais, même si les résultats du référendum interdit du 1er octobre (90 % d’indépendantistes avec 43 % de participation), restent impossibles à vérifier.