Les autorités séparatistes de Catalogne envisagent de déclarer l'indépendance de manière unilatérale dans les prochains jours sur la base d'un référendum, interdit par la Cour constitutionnelle espagnole, qu'ils disent avoir remporté.
Voici les principaux aspects de la proclamation unilatérale de la «République catalane».
Quand la déclaration pourrait-elle intervenir?
La loi sur le référendum d'autodétermination adoptée le 6 septembre par le parlement catalan, où les séparatistes sont majoritaires, prévoit que la victoire du «oui» entraîne «l'indépendance de la Catalogne».
Selon les résultats définitifs de la consultation publiés vendredi, le «oui» l'a emporté à 90,18% avec une participation de 43,03%. Mais le scrutin était dépourvu de recensement électoral transparent, il n'y a pas de commission électorale catalane et le décompte n'a pas été mené par un organisme indépendant.
Une fois que ces résultats auront été officiellement proclamés, la loi de référendum donne 48 heures pour que l'indépendance soit formellement déclarée au parlement catalan. Le tout est de savoir quand les autorités catalanes, qui décident du timing, comptent proclamer les résultats. Elles doivent aussi préciser si les deux jours donnés par la loi correspondent à des jours ouvrés et ouvrables.
Une indépendance immédiate?
La déclaration d'indépendance déclenche une «Loi de transition juridique» qui confère à la Catalogne le statut de «République de droit, démocratique et social» et ouvre une période de transition durant laquelle la «République» se dote de ses propres lois et institutions.
Cette législation sera en vigueur jusqu'à l'approbation d'une Constitution. Pendant six mois précédant le vote, un processus de consultation participatif sera mis en place. Le président régional de la Catalogne, l'indépendantiste Carles Puigdemont deviendra alors «président de la République».
Pour autant, son gouvernement n'a pour l'heure pas apporté énormément de précisions sur les moyens dont il disposerait pour assurer les fonctions dévolues à un Etat: la sécurité, le contrôle des frontières, les impôts... Là aussi, la Cour constitutionnelle est intervenue pour tenter de freiner le processus. Elle a censuré la «Loi de transition».
M. Puigdemont doit s'exprimer mardi soir au parlement, mais l'ordre du jour, vague, ne fait pas mention d'une éventuelle déclaration d'indépendance et l'annonce qu'il compte y faire pourrait viser à gagner du temps, en raison de divisions dans son camp sur les modalités de la transition. Il réclame une médiation internationale pour tenter de résoudre la crise avec le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy, farouchement opposé à toute sécession.
A l'inverse, le parti indépendantiste d'extrême gauche CUP veut rompre avec l'Espagne sans plus tarder.
Et la légalité?
Les autorités catalanes affirment avoir organisé la consultation de dimanche parce que Madrid refusait catégoriquement d'évoquer la question d'un référendum d'autodétermination en bonne et due forme, comme ceux menés au Québec ou en Ecosse.
En outre, les dirigeants régionaux accusent l'Etat espagnol de violer «le droit à l'autodétermination» des Catalans garanti par les Nations unies. Mais ce droit s'applique uniquement aux colonies et aux peuples opprimés, des catégories dans lesquelles la Catalogne n'entre pas, selon l'ancien secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon.
En outre la Constitution espagnole adoptée en 1978 «est fondée sur l'unité indissoluble de la nation espagnole, patrie commune et indivisible de tous les Espagnols». La justice et le gouvernement espagnol mettent ces articles en avant pour expliquer que toute décision qui touche à l'unité de l'Espagne ne peut être prise par une seule région.
Au plan international, la Catalogne indépendante pourrait être très isolée. Bruxelles a déjà prévenu qu'elle serait exclue de l'Union européenne.
Pourquoi l'indépendance?
La Catalogne a sa propre langue et sa culture. Elle compte 7,5 millions de personnes et pèse 19% du PIB espagnol. Mais ses relations avec Madrid sont complexes.Depuis 2010, l'indépendantisme a gagné du terrain, alimenté par la crise économique.
Les Catalans ont aussi mal vécu l'annulation partielle d'un Statut conférant de très larges compétences à la région, par la Cour constitutionnelle, à la demande du Parti populaire (PP, conservateur) de Mariano Rajoy. En 2014, la Catalogne se prononce à 80% pour l'indépendance lors d'une consultation symbolique, déclarée anticonstitutionnelle, avec une participation de 35%.
L'année suivante, les indépendantistes obtiennent la majorité au Parlement régional, lequel adopte une résolution sur un processus devant aboutir à «un Etat catalan indépendant prenant la forme d'une république» au plus tard en 2017. La Cour constitutionnelle annule cette résolution.