Le Conseil de sécurité de l'ONU est appelé par Washington à se prononcer lundi sur de nouvelles sanctions sévères contre la Corée du Nord, accusée de menacer la paix avec ses programmes d'armement nucléaire et conventionnel.
Le défi est double pour le Conseil et ses cinq membres permanents dotés du droit de veto (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie et Chine), aux positions souvent diamétralement opposées : ils doivent préserver leur unité face à Pyongyang, affichée lors des dernières prises de sanctions, et adopter des mesures toujours plus fortes pour prouver leur détermination.
Il faut «garder à tout prix l'unité du Conseil de sécurité car il s'agit du seul instrument qui puisse conduire à une initiative diplomatique avec des chances de succès», souligne dimanche le patron de l'ONU, Antonio Guterres, dans un entretien au journal français JDD.
Par les sanctions - sept trains de mesures ont déjà été pris -, l'ONU tente de pousser la Corée du Nord à négocier. Cette démarche a connu dans le passé des précédents positifs (Afrique du Sud, Iran) mais après des années et des années de sanctions.
«La fermeté maximale aujourd'hui sous la forme d'un renforcement des sanctions est notre meilleur levier pour promouvoir un règlement politique demain et notre meilleur antidote face aux risques de confrontation», fait valoir à l'AFP l'ambassadeur français à l'ONU, François Delattre.
«Pour donner une chance à la diplomatie et mettre fin à cette crise, nous avons besoin d'un changement d'attitude de la Corée du Nord maintenant. Cela veut dire la pression maximum possible», abonde son homologue britannique, Matthew Rycroft.
Il y a un mois, les Etats-Unis avaient réussi après de longues négociations à obtenir un vote favorable pour un septième jeu de sanctions de la Chine et de la Russie, principaux soutiens de la Corée du Nord, avec laquelle elles partagent une frontière. Les mesures prévoyaient alors une interdiction d'importer du charbon, du fer et des crustacés nord-coréens.
Sanctions contournées
Qu'en sera-t-il lundi ? Quelle dureté de texte sera retenue après le dernier essai nucléaire nord-coréen du 3 septembre ?
Le premier document soumis mercredi par Washington à ses pairs a été largement rejeté par Moscou et par Pékin, selon des sources diplomatiques. Il prévoit l'inspection par la force de navires suspects, un embargo total sur le pétrole, les produits pétroliers et le gaz, une interdiction d'importer du textile nord-coréen, un renvoi des expatriés nord-coréens dans leur pays, un gel des avoirs du dirigeant Kim Jong-Un, une interdiction d'entreprises communes avec Pyongyang et la fermeture de celles qui existent aujourd'hui.
Selon des diplomates, Moscou et Pékin, qui ne veulent pas voir la Corée du Nord s'effondrer avec une arrivée massive de réfugiés, ont refusé d'emblée la majorité des mesures proposées, n'acceptant de sanctionner que le textile.
Mais les deux capitales n'ont pas rejeté le texte en bloc. Tous les membres du Conseil, exaspérés par l'attitude nord-coréenne, veulent un accord et sont disponibles pour négocier, assurent plusieurs diplomates.
En début de week-end, Washington a commencé à faire circuler «un nouveau texte amendé», selon un spécialiste du dossier requérant l'anonymat. Les Etats-Unis «ont fait des concessions» notamment sur le pétrole et les inspections en haute mer, ajoute-t-il sans autre détail.
Moscou et Pékin plaident de longue date pour que les sanctions de l'ONU soient accompagnées d'une offre sérieuse de dialogue qui puisse mener à une solution politique. En cas d'accord entre Washington, Moscou et Pékin, un volet à ce sujet devrait être intégré dans la résolution.
Dans son approche menée au pas de charge, Washington manie deux menaces : le recours à la force militaire et l'éventualité de sanctionner tout pays ayant des liens commerciaux avec Pyongyang si aucun accord n'est trouvé à l'ONU. Quelque 90% du commerce extérieur nord-coréen sont à destination de la Chine.
Selon un rapport d'experts de l'ONU publié ce week-end, la Corée du Nord a continué entre février et août à «contourner l'embargo sur les armes, les sanctions financières et sectorielles sévères, montrant que plus le régime de sanctions est étendu, et plus les contournements sont nombreux».
Le rapport dénonce une application aléatoire des sanctions et précise que Pyongyang est passé maître dans l'art d'utiliser des pays tiers pour acheminer ses cargaisons ou conclure des transactions financières.