Saint-Etienne-du-Rouvray commémorera mercredi l'assassinat de son prêtre en pleine messe il y a un an par deux jihadistes, une première en Europe, qui a bouleversé un pays déjà secoué par une série d'attentats, dont celui de Nice, 12 jours auparavant.
Jacques Hamel, prêtre auxiliaire de 85 ans, a été égorgé dans cette ville communiste de la banlieue de Rouen alors qu'il célébrait une messe matinale pour cinq fidèles, trois religieuses et un couple d'octogénaires dont l'homme a été grièvement blessé.
Les assassins, qui se réclamaient de Daesh, Adel Kermiche et Abdel Malik Petitjean, 19 ans, tous deux fichés S, ont été abattus par les forces de l'ordre à leur sortie de l'église.
Deux hommes ont été écroués dans cette affaire : un cousin de Petitjean, âgé de 31 ans, dont les enquêteurs ont la conviction qu'il connaissait son projet, et un homme de 22 ans, originaire de la banlieue toulousaine, qui a rejoint Petitjean et Kermiche à Saint-Étienne-du-Rouvray, mais les a quittés sans participer à l'attaque.
Les enquêteurs attendent toujours des retours d'informations de la zone irako-syrienne, d'où les deux jeunes gens auraient été téléguidés, selon une source proche du dossier.
A trois jours de la commémoration, chrétiens et musulmans de cette ville de près de 30.000 habitants se disent plus que jamais unis.
«L'attentat, c'était probablement pour monter les religions les unes contre les autres. C'est un échec total. Nous avons reçu beaucoup de messages de soutien de musulmans. Nous avons eu des visites de musulmans du Canada, de Grande-Bretagne, d'Égypte», a expliqué à l'AFP Auguste Moanda, prêtre de Saint-Étienne-du-Rouvray, dont Jacques Hamel était l'auxiliaire. Il regrette seulement avoir reçu «quelques courriers mais minoritaires de paroissiens» s'en prenant à l'islam.
«On ne peut pas faire ça au nom de l'islam»
Localement «nos relations avec les musulmans étaient déjà bonnes mais il y a maintenant une volonté de part et d'autre d'aller plus loin», affirme-t-il.
Hamadi Lakhdhar, chargé de l'entretien de la mosquée de Saint-Étienne-du-Rouvray, pense aussi que l'attentat a «échoué» à répandre la «haine». «Il y a toujours des racistes mais c'est une minorité. La plupart des gens savent qu'on ne peut pas faire ça au nom de l'islam», explique-t-il.
«La volonté de vivre ensemble continue de cheminer», confirme à l'AFP Hubert Wulfranc ex-maire PCF de la ville devenu député.
Deux jours après l'assassinat, près de 3.500 personnes avaient rendu hommage au père Hamel. Dans les semaines qui ont suivi, la mairie a reçu de 6.000 à 7.000 «lettres, cartes, poèmes, œuvres d'art ou artisanales» de France et d'ailleurs, selon M. Wulfranc. Le dimanche suivant l'attaque, des centaines de musulmans étaient allés prier dans les églises de France aux côtés des catholiques en signe de «solidarité».
Mercredi, les cérémonies de commémoration se dérouleront en plusieurs temps. L'archevêque de Rouen présidera une messe à 9H00 dans l'église martyre du XVIIe siècle. Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb assistera à cette cérémonie placée sous la surveillance de 130 à 150 policiers.
Anouar Kbibech, président du Conseil français du culte musulman (CFCM) jusque fin juin, participera à cet hommage avec «une délégation importante» du Conseil régional du culte musulman, a indiqué vendredi à l'AFP son président, Mohammed Karabila.
Après la messe, un monument «républicain pour la paix et la fraternité et à la mémoire» du prêtre sera inauguré près de l'église. Un prêtre que ceux qui le côtoyaient ont décrit à l'AFP comme «très simple», «discret» et «très disponible».
Une cérémonie plus restreinte est également prévue mercredi à 18h00 à Bonsecours, une autre commune de la métropole rouennaise, où repose le prêtre qui fait depuis avril l'objet d'un procès en béatification, une exception aux règles du Vatican. Un délai de cinq ans sépare habituellement le décès d'une personne de la date du début de son procès