Les restes de 71 victimes bosniaques récemment identifiées du massacre de Srebrenica, il y a 22 ans en Bosnie, ont été inhumés mardi au mémorial de cette tuerie, la pire sur le sol européen depuis la fin de Deuxième Guerre mondiale.
En quelques jours de juillet 1995, plus de 8.000 Musulmans, quasi-exclusivement des hommes et des adolescents, qui fuyaient l'enclave de Srebrenica ont été massacrés par les forces serbes de Bosnie du général Ratko Mladic. Un bain de sang considéré comme un acte de génocide par la justice internationale.
Comme chaque année le 11 juillet, des milliers de personnes se sont pressées au mémorial de Potocari. Elles se sont réunies autour des 71 cercueils recouverts d'un drap vert, caressés par des femmes en pleurs. Fata Omerovic, 65 ans, étreint les pierres tombales de ses deux fils et de son mari : «Il ne me reste qu'une fille, personne d'autre», dit-elle. Son troisième fils a été tué au début de la guerre (1992-95) qui a fait plus de 100.000 morts.
«Mes deux grands-pères ont aussi été tués. Ils sont déjà enterrés. Heureusement, leurs corps ont été retrouvés complets", dit Adela Efendic, 22 ans, venue enterrer son père, tué à 35 ans. Les restes des 71 victimes, dont sept adolescents et une femme, ont rejoint 6.439 autres morts, tandis que 233 sont enterrés ailleurs, selon l'Institut bosnien pour les disparus. Un millier sont encore non identifiés ou n'ont pas été retrouvés.
A Belgrade, le président serbe Aleksandar Vucic a répété qu'«un terrible crime (avait) été commis» à Srebrenica. Il a également évoqué les crimes dont ont été victimes les Serbes dans les Balkans pendant les conflits des années 1990 ou la Deuxième Guerre mondiale. La Serbie refuse de considérer le massacre de Srebrenica comme un génocide. Plusieurs dirigeants de l'opposition ont plaidé en ce sens.
Mais «leurs paroles n'engagent pas l’État», a déclaré Aleksandar Vucic, qui était à l'époque des guerres des Balkans un proche collaborateur du faucon ultranationaliste serbe Vojislav Seselj. Sa visite il y a deux ans au mémorial, avait été émaillée d'incidents. «Il ne peut y avoir de réconciliation sans vérité et sans justice», a dit mardi Bakir Izetbegovic, le chef politique des musulmans de Bosnie. Il a appelé les Serbes à «cesser de nier le génocide commis ici».
Devant le Parlement à Belgrade, des associations ont déployé une banderole en hommage aux «victimes serbes innocentes assassinées par des criminels de guerre musulmans» dans la région de Srebrenica. Pendant le conflit, 3.267 militaires et civils serbes de cette région ont été tués, selon les associations serbes. Un rassemblement à la mémoire des 8.000 hommes et adolescents assassinés à Srebrenica devait avoir lieu dans la soirée en face, devant la présidence serbe.
A Banja Luka, la capitale des Serbes de Bosnie, une manifestation de soutien à Ratko Mladic, prévue pour ce mardi, a finalement été interdite. Si Radovan Karadzic a été condamné par la justice internationale pour le massacre de Srebrenica, Ratko Mladic est dans l'attente du verdict, prévu pour novembre, dans son procès.