Six mois après le choc de l'élection d'un président américain climatosceptique, les délégations de 196 pays entament lundi à Bonn des discussions sur la mise en oeuvre de l'accord de Paris sur le climat.
«Cet accord international est le dernier espoir de survie pour les petits Etats insulaires», a déclaré Thoriq Ibrahim, le ministre de l'Environnement des Maldives, dans un communiqué publié à la veille du rendez-vous à Bonn.
Sa déclaration reflète l'extrême inquiétude des pays les plus vulnérables au changement climatique, renforcée avec l'arrivée de Donald Trump et sa volonté affichée de ne pas lutter contre le réchauffement de la planète dont la vitesse est inédite.
Les pays côtiers -et les petites îles en particulier car elles n'ont pas de solutions de repli- sont particulièrement exposés à l'élévation du niveau de la mer causée par le changement climatique (dilatation des eaux, fonte des calottes aux pôles et des glaciers de montagne).
Mais Thoriq Ibrahim a aussi mis en avant la poursuite de la mobilisation politique malgré l'élection de Donald Trump en plein milieu de la dernière conférence de l'Onu sur le climat à Marrakech: «depuis la COP22 en novembre, 44 pays ont ratifié l'accord», portant le total des pays étant allés au bout de ce processus à 144, soit 83% des émissions mondiales.
L'Union européenne et 196 pays sont membres de la Convention climat de l'Onu depuis l'adhésion de la Palestine fin 2015.
Parmi les grands émetteurs de gaz à effet de serre, seule la Russie (le 5e après la Chine, les Etats-Unis, l'Union européenne et l'Inde) n'a pas ratifié le texte, qu'elle a pourtant entériné à Paris.
Il est peu probable qu'elle le fasse sous la présidence de Vladimir Poutine qui a déclaré fin mars qu'il était «impossible» d'empêcher le réchauffement climatique, notamment lié selon lui à «des cycles globaux sur Terre».
La Chine et l'Inde mobilisées
Si les gouvernements américain et russe sont en retrait de la lutte climatique, la Chine et l'Inde ont réaffirmé leurs engagements, qui leur permettent aussi de lutter contre la pollution de l'air et de réduire leur facture pétrolière.
«La Chine est sous forte pression au niveau domestique pour réduire la pollution de l'air due au charbon et aux carburants fossiles et voit un intérêt stratégique à être leader sur les marchés des nouvelles technologies», explique Alden Meyer, expert auprès de l'Union of concerned scientists.
«Delhi voit aussi des avantages énormes dans ses objectifs de développement des énergies renouvelables» en terme de qualité de l'air et de réduction des importations de pétrole, ajoute-t-il.
«La transition vers une économie bas-carbone progresse partout sur la planète», souligne Laurence Tubiana, la directrice générale de l'European climate foundation et ex-négociatrice française, en citant comme exemple l'Inde qui «vise 100% de véhicules électriques en 2030».
A Bonn, les pays ont dix jours pour progresser dans l'élaboration d'un «manuel» de l'accord de Paris qui est juridiquement entré en vigueur mais dont les dispositions très générales doivent être précisées d'ici fin 2018.
«Cette réunion va permettre aux gouvernements d'avancer clairement sur les règles pour mettre pleinement en oeuvre l'accord de Paris», a souhaité vendredi Patricia Espinosa, la responsable de la Convention climat de l'Onu.
«Bonn n’est pas un moment de décision à proprement parler, mais un dialogue absolument nécessaire pour préparer la COP23», note Laurence Tubiana.
Les Fidji présideront en novembre 2017 la COP23 qui se déroulera pour des raisons de logistique à Bonn, siège de la Convention climat.
L'accord de Paris engage la communauté internationale à agir pour limiter la hausse de la température moyenne «bien en deçà de +2°C» -un seuil déjà synonyme de bouleversements à grande échelle- et «si possible à +1,5°C» par rapport à l'ère industrielle. Les engagements actuels conduisent à une hausse de 3°C du thermomètre mondial.