Porté par des sondages encourageants, le nouveau chef de file des sociaux-démocrates allemands Martin Schulz a lancé dimanche sa campagne électorale pour tenter de détrôner Angela Merkel en promettant justice sociale et fermeté contre la droite nationaliste.
«J'ai l'ambition de devenir chancelier» et de faire du SPD «la première force politique du pays», a déclaré à Berlin dans son premier grand discours celui fut pendant cinq ans jusqu'en janvier président du Parlement européen. Au vu des enquêtes d'opinion, la chancelière conservatrice reste encore largement favorite pour obtenir un quatrième mandat à l'issue des élections législatives du 24 septembre, qui seront précédées au printemps de trois scrutins régionaux importants.
Mais alors que le SPD atteignait depuis des mois des records d'impopularité, menaçant même d'être rattrapé dans les intentions de vote par la droite radicale anti-immigration, l'arrivée de Martin Schulz, confirmé dimanche comme candidat à la chancellerie par son parti, a donné un nouvel élan. Schulz remplace comme figure de proue celui qui apparaissait jusqu'alors comme le candidat naturel des sociaux-démocrates, Sigmar Gabriel. Ce dernier a finalement jeté l'éponge cette semaine face aux mauvais sondages.
Un européen proche du peuple
Plus à gauche que Sigmar Gabriel, l'ex-président du Parlement européen a d'emblée dit dimanche vouloir lutter «pour une Allemagne plus juste», dénonçant les «boni» des patrons et les «paradis fiscaux» permettant aux grands groupes d'échapper à l'impôt. Excipant de sa propre biographie - il est issu d'un milieu modeste et n'a pas fait d'études - Martin Schulz a promis de défendre les classes populaires et leurs «soucis quotidien». Une tentative pour lui reconquérir un électorat qui, comme partout en Europe, s'est largement détourné de la social-démocratie.
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Novice en politique allemande au niveau national - il fut parlementaire européen à partir de 1994 - l'homme a mis en avant son expérience de maire d'une ville moyenne allemande au début de sa carrière en gage de proximité avec la population. La deuxième priorité de Martin Schulz, 61 ans, est la lutte contre la progression du parti nationaliste «Alternative pour l'Allemagne», qu'il a qualifié de «honte pour la République».
«Nous savons en Allemagne à quoi peut mener un nationalisme aveugle», a-t-il tonné, accusant par ailleurs le président américain Donald Trump d'avoir «brisé un tabou» avec son projet de Mur anti-migrants avec le Mexique.
Regain d'espoir
Martin Schulz, 61 ans, redonne espoir à un parti qui avait depuis des mois abandonné toute illusion de faire vaciller Angela Merkel, malgré les critiques dont elle fait l'objet pour avoir ouvert les portes de l'Allemagne aux réfugiés. Le parti se battait surtout pour rester partenaire minoritaire de la coalition avec les conservateurs dans le prochain gouvernement. Les deux premiers sondages parus après l'annonce de sa candidature, pour les chaînes de télévision ZDF et ARD, montrent une progression du SPD de trois points dans les intentions de vote, à respectivement 24% et 23 %, et une baisse du parti de la chancelière, la CDU, de deux points, à 35%.
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En termes de popularité personnelle, Martin Schulz fait même jeu égal avec Angela Merkel. Une proportion presque identique d'Allemands, autour de 40%, souhaite voir les deux responsables à la Chancellerie après les élections. «La chancelière a maintenant un problème, un gros problème», juge le magazine Stern, «avec Martin Schulz elle a un rival aussi populaire qu'elle, qui va être en mesure de mobiliser son parti et va pouvoir l'attaquer car il ne fait pas partie de la coalition» gouvernementale actuelle.
Néanmoins, la popularité personnelle a ses limites dans le système allemand. Le chancelier n'est pas élu directement par la population mais par les députés. Et là, le SPD de Martin Schulz a encore un très gros retard à combler sur la CDU. «Schulz n'a jusqu'ici pas de contours politiques précis» en Allemagne, «il s'est fait connaître comme président du Parlement européen mais ce n'est pas avec l'Europe qu'on gagne une élection allemande», met en garde le directeur de l'institut de sondage Forsa, Manfred Güllner.