Une extrême droite qui croit plus que jamais en sa victoire en 2017, une primaire de la droite qui peut réserver des surprises, une gauche qui appelle au rassemblement pour conjurer sa défaite annoncée : la victoire de Trump aux Etats-Unis rebat les cartes à six mois de la présidentielle française.
A droite :
La victoire de Trump a pris un relief particulier en pleine primaire de la droite, marquée par le duel Juppé-Sarkozy. L'ancien chef de l'Etat, donné battu par le maire de Bordeaux dans les sondages mais qui prétend sentir monter en sa faveur une "majorité silencieuse", a vu dans la victoire du milliardaire populiste "le refus d'une pensée unique". Celui qui fustige à l'envi "l'alternance molle" qu'incarnerait M. Juppé a aussi jugé que dans ce nouveau contexte diplomatique, il n'y avait "pas de place pour l'impuissance, la faiblesse et le renoncement".
A une dizaine de jours du premier tour de la première primaire de l'histoire de la droite française (20 novembre), clin d'oeil au système électoral américain, les sarkozystes voient en outre dans la défaite de la favorite Hillary Clinton un signe encourageant. "La victoire de M. Trump rappelle qu'en démocratie un président est élu et pas choisi par les médias et les sondeurs", a réagi le porte-parole de Nicolas Sarkozy, Eric Ciotti.
M. Juppé, présenté par ses adversaires comme le candidat des médias et du "système", a mis en garde en retour les Français contre "tous les risques que la démagogie et l'extrémisme font courir à la démocratie et le caractère vital des choix qu'ils ont à faire". Dans le camp juppéiste, on réfute également la comparaison entre le favori des sondages pour la primaire, installé dans le paysage politique français depuis plusieurs décennies, et Hillary Clinton, la mal-aimée. "Clinton, elle avait un problème éthique avec le peuple. Juppé a justement une image de responsabilité, de présidentialisation, ça n'a rien à voir avec Hillary Clinton qui était très contestée", s'est rassuré Jean-Pierre Raffarin, soutien du maire de Bordeaux.
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A gauche :
La victoire de Donald Trump constitue un électrochoc à gauche, à laquelle est promise une élimination dès le premier tour de la présidentielle. Mardi soir, devant une centaine de députés socialistes, le président de la République avait déjà souligné la "grande responsabilité" de la gauche face à l'extrême droite. Dans une allocution solennelle mercredi, le chef de l'Etat, pour qui la victoire de Trump "ouvre une période d'incertitude", a appelé à "trouver les réponses", qui "sont en nous", aux "peurs" qui auraient abouti à l'élection américaine.
Seul salut possible pour la gauche: le rassemblement. "La gauche est prévenue! Continuons nos enfantillages irresponsables et ça sera Marine Le Pen", a mis en garde le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis, tandis que la porte-parole du parti, Corinne Narassiguin, appelait les possibles candidats à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron et Yannick Jadot à "rejoindre le primaire" de gauche pour aboutir à un candidat unique.
Ces appels à l'unité emprunts d'une forme de "culpabilisation" ont déplu à gauche de la gauche. "T'as vraiment rien compris au film", a répliqué à M. Cambadélis le secrétaire national d'EELV David Cormand. Pas de ralliement à espérer non plus du côté de Jean-Luc Mélenchon, pour qui "les primaires sont une machine à museler l'énergie populaire".
A l'extrême droite :
Marine Le Pen, une des rares personnalités politiques françaises à avoir ouvertement exprimé son rejet de la favorite démocrate Hillary Clinton, a été parmi les premières à féliciter Donald Trump, avant même la confirmation de son succès.
Ces proches y voient une répétition générale avant le succès de leur propre candidate dans six mois. "Tout le système s'est mobilisé contre lui (...) Ça vous rappelle pas quelqu'un?" a tweeté un vice-président du FN, Steeve Briois.
Brouillé avec sa fille, Jean-Marie Le Pen, a cependant envoyé une pique à la candidate frontiste, au slogan de "La France apaisée", alors que M. Trump multipliait les déclarations tonitruantes: "Ca va prouver une chose, que la dédiabolisation est une foutaise et une impasse".