Le parlement indépendantiste de Catalogne devait proclamer lundi le début d'un processus de sécession de l'Espagne, franchissant un nouveau seuil dans la confrontation avec le gouvernement de Madrid.
Les deux partis indépendantistes, qui ont remporté avec 48 % des voix la majorité absolue au parlement catalan lors d'élections régionales le 27 septembre, doivent voter une résolution annonçant "solennellement le démarrage du processus de création de l'Etat catalan indépendant" qui serait proclamé en 2017. Le texte, dénoncé par toute l'opposition, doit être débattu à partir de 10H00 (09H00 GMT) et approuvé par les 62 députés de la coalition "Junts pel si" (JxS Ensemble pour le oui) du président sortant Artur Mas et les 10 élus de la gauche anti-capitaliste CUP.
Le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy a annoncé qu'il demanderait immédiatement à la Cour constitutionnelle l'annulation de cette résolution mais la décision de la Cour ne freinera pas l'élan des indépendantistes.
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La résolution prévoit en effet que les élus catalans "ne se soumettront plus aux institutions de l'Etat espagnol, en particulier à la Cour constitutionnelle". "Le contenu de la résolution sera appliqué quoi que dise la Cour. Nous avons la force et la légitimité, même si le gouvernement espagnol s'y oppose", a affirmé à l'AFP un député de JxS, Pere Aragonés. M. Rajoy a rencontré toutes les forces politiques d'Espagne pour tenter de former un front contre la sécession avant les élections législatives du 20 décembre. Il s'est assuré de l'appui du parti socialiste (PSOE), son rival traditionnel, et du parti de centre-droit Ciudadanos, farouchement anti-indépendantiste.
Mais la gauche radicale Podemos, quatrième dans les intentions de vote des électeurs, a refusé de le suivre. Podemos veut permettre à la Catalogne de se prononcer sur son avenir par un référendum que ne prévoit pas la constitution actuelle.
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Face à ce défi, sans précédent depuis que l'Espagne a retrouvé la démocratie après la mort du dictateur Francisco Franco en 1975, les conservateurs ont fait passer au parlement une réforme de la Cour constitutionnelle qui lui permet de démettre de leurs fonctions les dirigeants qui ignorent ses décisions. Le gouvernement a laissé entendre que la présidente du parlement catalan, Carme Forcadell, serait la première visée. De plus, il joue avec l'idée de suspendre l'autonomie de la Catalogne, comme le prévoit un article jamais utilisé de la constitution. Le ministre des Finances a également évoqué la menace de couper les vivres à cette région très endettée et qui peine à payer ses fournisseurs.
La résolution est une nouvelle escalade de la tension qui monte entre Barcelone et Madrid depuis 2010, quand la Cour constitutionnelle a réduit les compétences reconnues à la Catalogne par un statut d'autonomie que le parlement national avait approuvé quatre ans plus tôt. Le mouvement séparatiste, jusque là minoritaire, n'a cessé de gagner du terrain, alimenté par la crise économique. Depuis 2012 il réclamait un référendum sur l'indépendance de cette région de 7,5 millions d'habitants qui produit un cinquième du PIB de l'Espagne"Le référendum était un instrument idéal mais le gouvernement espagnol l'a empêché. La seule option qui nous reste est d'agir unilatéralement", a déclaré à l'AFP Albert Botran, député de la CUP.
Pour l'opposition, la sécession n'est pas seulement illégale mais elle ne respecte pas les 52% des électeurs qui s'y opposent. "Tout cela est anticonstitutionnel, illégal et antidémocratique parce qu'ils mentent quand ils disent que la majorité des Catalans soutiennent la déconnexion de l'Espagne", affirme Albert Rivera le chef de Ciudadanos. Le mouvement pourrait finir dans l'impasse si JxS et la CUP ne parviennent pas à s'entendre sur le nom du président du parlement catalan. La CUP refuse ses voix à Artur Mas, le candidat actuel. Le débat d'investiture s'ouvre lundi. Faute d'accord d'ici le 9 janvier, il faudra convoquer de nouvelles élections et le premier parlement indépendantiste de Catalogne n'aura été qu'un épisode de l'histoire.