Le magazine en ligne The Intercept a publié The Drone Papers, une enquête sur les opérations de drones de l'armée américaine en Somalie, au Yémen et en Afghanistan. Elle détaille notamment la manière dont sont choisies les cibles à éliminer.
L'informateur serait un ancien membre du renseignement américain, qui aurait décidé de rendre publiques les méthodes de l'armée qu'il jugeait abusives. "L'utilisation abusive de la méthode consistant à mettre les gens sur des listes, de leur assigner des cartes de baseball, de les condamner à mort sans les en informer était, depuis le début, une erreur", a-t-il expliqué au journaliste de The Intercept, Jeremy Scahill.
Parmi les informations publiées dans The Drone Papers, on apprend notamment qu'entre janvier 2012 et février 2013, "90% de personnes tuées au cours des opérations spéciales menées par les drones des forces américaines n'avaient pas été péalablement définis comme des cibles". Ainsi, lors de l'opération Haymaker, menée dans le nord-est de l'Afghanistan entre janvier 2012 et février 2013, les frappes de drones ont tué plus de 200 personnes, alors que seules 35 étaient visées.
Cibles imprimées sur cartes de baseball
L'enquête détaille également le processus de décision qui aboutit aux frappes de drones, du soldat chargé de le piloter au président des Etats-Unis. On apprend notamment que les agents du renseignement éditent des "cartes de baseball", sur lesquelles apparaît un portrait de la cible. Y sont indiqués ses liens avec d'autres extrêmistes, ainsi que la menace qu'elle représente pour les Etats-Unis. Ce sont ces cartes qui sont transmises au président, qui décide alors s'il donne son feu vert aux frappes.
Les Drones Papers doivent leur titre à une série d'articles sur la guerre du Vietnam publiés en 1971 par le New York Times, les Pentagon Papers. Ces derniers avaient notamment révélé que le gouvernement américain avait ordonnée des bombardements secrets sur le Laos, amplifiant les opérations alors que le président Lyndon Johnson avait promis l'inverse.
Un "acte de courage" selon Snowden
Ces révélations pourraient avoir le même retentissement que celles d'Edward Snowden et de Chelsea Manning, les deux lanceurs d'alerte qui avaient, les premiers, mis en lumière les méthodes du Pentagone en Irak et en Afghanistan. Snowden a d'ailleurs salué "un acte étonnant de courage et de civisme" sur Twitter.
In an astonishing act of civil courage, one American just shattered an unspeakable lie. https://t.co/2H81IMKPha pic.twitter.com/OwIqygfpqJ
— Edward Snowden (@Snowden) 15 Octobre 2015
L'affaire a également mis la lumière sur The Intercept, média en ligne qui s'inscrit dans la lignée de WikiLeaks, le site fondé par Julian Assange. Le site a été crée en février 2014, par Glenn Greenwald, le journaliste qui avait publié les révélations d'Edward Snowden sur les programmes de surveillance de masse de la NSA. Avec ses collègues Jeremy Scahill et Laura Poitras, ils se sont donnés pour mission de faire vivre une plateforme permettant de publier les documents fournis par des lanceurs d'alerte.