Le Norman Atlantic n'est pas encore prêt de livrer ses secrets, plus de trois jours après l'incendie de ce ferry en mer Adriatique, qui a fait au moins 13 morts, mais un nombre toujours indéterminé de "disparus".
La plupart des 427 rescapés ont pu retrouver leur proches entre mardi et mercredi, mais le ferry, lui, était toujours en mer mercredi, dans le canal d'Otrante, qui sépare l'Italie de l'Albanie.
Il devait être remorqué mercredi vers le port italien de Brindisi (sud-est) mais, en raison du mauvais temps, le navire a pris la direction de l'Albanie, vers la baie de Vlora pour se mettre à l'abri.
Il reprendra ensuite le chemin de Brindisi, destination favorisée par les autorités italiennes, qui ont coordonné les secours. Il faudra pour cela attendre une amélioration des conditions météorologiques, mais un départ dès mercredi soir n'est pas exclu, selon le procureur de Bari (sud-est), Giuseppe Volpe, en charge de l'enquête en Italie.
Cela devrait permettre une arrivée de jour à Brindisi, distant d'environ 80 milles (150 km) de Vlora, afin de faliciter les délicates manoeuvres d'approche, a-t-il encore expliqué.
L'Albanie a annoncé mercredi en milieu de journée avoir autorisé le ferry à quitter ses eaux territoriales.
Mystère entier
En attendant cette arrivée qui n'a cessé depuis lundi d'être retardée, le mystère reste entier sur le nombre de victimes de l'incendie, dont plusieurs pourraient encore se trouver dans les profondeurs du navire.
La présence de clandestins à bord est désormais "établie", trois d'entre eux ont été identifiés, deux Afghans et un Syrien ayant demandé l'asile politique, avait indiqué le procureur en charge de l'enquête ouverte en Italie, Giuseppe Volpe.
Mais il y en avait sans doute bien davantage cachés dans les nombreux camions transportés par le Norman Atlantic, avait-t-il expliqué. Or, l'incendie s'est déclenché au niveau des ponts inférieurs, là où étaient garés ces camions.
Deux des trois victimes italiennes sont d'ailleurs des chauffeurs de camions.
Le port de Patras en Grèce, point de départ du ferry, est une des plaques tournantes du trafic de clandestins en Méditerranée, où des milliers d'hommes, de femmes et parfois d'enfants cherchent désespérément à s'embarquer en quête d'une vie meilleure.
500 personnes à bord ?
Plusieurs rescapés ont évoqué la présence de migrants clandestins à bord, à leur arrivée mardi à Brindisi ou lundi à Bari, un peu plus au nord.
Près de 500 personnes ont pu se trouver à bord du Norman Atlantic, a estimé le procureur Volpe. C'est nettement plus que les 474 personnes enregistrées sur le manifeste d'embarquement, selon la compagnie grecque Anek, qui a affrêté ce ferry.
Cette liste a été plusieurs fois révisée, passant de 478, puis 475 avant de s'établir mercredi à 474 passagers et membres d'équipage.
Sur les 371 passagers récupérés sur le ferry, 234 sont grecs, 54 turcs, 22 albanais, 22 italiens et 10 de nationalité suisse, sans compter d'autres nationalités ... et deux chiens. Neuf des dix Français présents à bord ont été pris en charge, mais on est toujours sans nouvelle du dixième.
La justice italienne va désormais s'efforcer d'établir les circonstances de ce drame et de désigner les responsables, alors que des passagers ont dénoncé le manque de préparation de l'équipage.
Le commandant du Norman Atlantic, Argilio Giacomazzi, a été interrogé une partie de la nuit par les services du procureur Volpe, a-t-on appris de source judiciaire.
"Nous avons clarifié chaque aspect et répondu à toutes les questions", a affirmé son avocat, Alfredo Delle Noci.
Les enquêteurs se sont en particulier intéressés aux procédures de sécurité, que le commandant a dit avoir pleinement respectées, en particulier en ne donnant l'alerte générale qu'une fois établi le danger posé par l'incendie.
Plusieurs passagers avaient dénoncé l'absence d'alerte et de consignes de la part de l'équipage.
"C'était la panique à bord car on était plus de 400 personnes à devoir sortir par une seule sortie de secours", a raconté à l'AFP une jeune Grecque, Urania Thiréou.