Chaque après-midi, lorsque la température ressentie avoisine les 48 degrés dans les rues de La Havane, Dalia Sandoval emmène son neveu de 12 ans et d'autres enfants du quartier dans une piscine abandonnée bordant les eaux du détroit de Floride.
Pendant plusieurs heures, elle demeure invariablement assise en tentant d'éviter les coups de soleil à l'aide d'un parapluie, pendant que José et ses amis pataugent dans le bassin défoncé rempli d'eau de mer.
"Je les accompagne toujours parce que la pleine mer est juste là, et j'ai peur qu'il leur arrive quelque chose", confie-t-elle à l'AFP.
Le long des 20 km de côte de la capitale cubaine, les Havanais, toutes classes confondues, convergent dès qu'ils le peuvent vers le bord de mer pour échapper à la chaleur étouffante, renforcée par un taux d'humidité qui peut atteindre plus de 90%.
Selon l'institut de météorologie cubain, l'île traverse son troisième été le plus brûlant depuis 1951, avec une température moyenne de 28 degrés.
Selon des spécialistes locaux, lorsque la température atteint 34 degrés, ce qui se produit à peu près tous les jours au mois d'août, la sensation thermique frôle les 48 degrés du fait de la forte humidité.
Sur le bord de mer de la capitale, les lieux fréquentés par les plus modestes n'ont de plage que le nom : espaces sablonneux inexistants, pas de sauveteurs ni de buvettes. Et encore moins de toilettes. Les rares "vraies" plages sont privées et réservées aux clients des hôtels ou des "cercles sociaux".
Pour le sable fin et les eaux claires, il faut se rendre à au moins 20 km à l'extérieur de la ville, un trajet souvent hors de portée de bourse pour les "Habaneros".
- Dents de chien et piscines gonflables -
En guise de plage, ce sont les "dents de chien", rochers tranchants sculptés par le ressac, qui accueillent les baigneurs le long de la capitale. Parmi les plus fréquentées, figure "El Yaque", rivage situé à quelques encablures du célèbre Teatro Karl Marx, où des brise-lames de ciment encadrent des eaux tranquilles.
Un peu plus à l'ouest, Miramar, le quartier des ambassades, compte également quelques spots bétonnés ou rocailleux prisés des riverains. La "plage de la rue 26" est notamment assez populaire.
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"Je viens toujours sur cette plage pour fuir la chaleur. On reste un bon moment ici, de huit heures du matin à cinq heures du soir", explique Michael Sanchez Díaz, un lycéen de 15 ans habitant le quartier populaire voisin de Marianao. Autour de lui, défilent les vendeurs ambulants des traditionnels cornets de cacahouètes grillées, mais aussi de glaces ou de sodas frais.
Dans les rues de la ville, le torse nu et le débardeur sont de rigueur pour les hommes et la plupart des habitants trouvent refuge dans la rue ou sous leur porche en quête d'un courant d'air. Sur les places, enfants et animaux s'ébrouent dans les fontaines.
Même les indéboulonnables joueurs de domino des ruelles du centre-ville sont parfois obligés de déplacer leurs tables pour trouver un petit coin ombragé.
La chaleur moite pousse d'autres habitants de La Havane à recourir à des procédés plutôt rudimentaires. Le petit entrepreneur Reinier Labrada, de La Víbora (quartier sud), confie à l'AFP que lorsqu'il n'en peut plus, il se met en maillot de bain et improvise des ablations avec un seau d'eau.
D'autres ont acheté des piscines gonflables ou se sont fait construire des bassins en ciment. Certains opportunistes disposant de vraies piscines n'hésitent pas à faire payer l'entrée de leur jardin ou de leur toit à leurs voisins.
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Un commerce lucratif vu que l'entrée est facturée en moyenne 2 dollars, alors que les hôtels de la capitale cubaine font payer 10 dollars aux clients d'un jour.
Mais le salaire moyen des Cubains n'est que de 20 dollars, alors la majorité se voit contrainte de marcher plusieurs kilomètres jusqu'à la rive la plus proche, puis de tenter de trouver son petit coin dans les rochers ou le ciment, avant de jouir, enfin, d'un bain salutaire.