La victoire de Sissi à la présidentielle égyptienne semble jouée d’avance. L’ancien militaire a vite repris le contrôle du pays.
Il ne se montre pas, mais on le voit partout. Si Abdel Fattah al-Sissi n’est pas apparu en public de toute la campagne présidentielle, officiellement pour des raisons de sécurité, son visage est affiché partout dans le pays. Dans chaque rue, chaque commerce, jusque dans les mosquées.
Une omniprésence qui ne laisse aucun doute quant à l’issue du scrutin présidentiel qui s’achève aujourd’hui.
Et alors que les résultats officiels ne sont attendus qu’au début du mois de juin, son triomphe se met en place depuis déjà plusieurs mois.
De simple militaire à président
Promu au grade de maréchal en janvier dernier, Abdel Fattah al-Sissi, 59 ans, a fait toute sa carrière dans l’armée, du poste d’attaché militaire en Arabie Saoudite à celui de chef des armées, en passant par chef des renseignements militaires.
Un atout pour la population égyptienne, aux yeux de laquelle il rappelle Nasser, président charismatique des années 1950 et 1960, lui aussi militaire.
Surtout, les Egyptiens voient en lui leur sauveur, celui qui les a débarrassés des Frères musulmans. Le 3 juillet 2013, après des semaines de manifestations contre le président Morsi, al-Sissi a en effet mené la fronde qui a conduit à la destitution de celui qui l’avait nommé ministre de la Défense.
Devenant par la même occasion l’homme fort du pays, le seul capable aux yeux de nombreux Egyptiens de ramener la stabilité après les trois années de chaos et de crise économique qui ont suivi la révolution de 2011.
"La popularité de Sissi s’explique par le rejet des Frères musulmans, qui ont fait profiter leur mouvement au détriment de l’Etat, et également par une propagande qui fait de lui un nouveau pharaon, explique Antoine Basbous, directeur de l’Observatoire des pays arabes et auteur du Tsunami arabe (Fayard). Mais le plus difficile commence maintenant pour lui."
Quel avenir pour l’Egypte ?
Dans le bureau où il a voté lundi, Sissi a promis aux Egyptiens que "Demain sera[it] magnifique". Une promesse qu’il devra tenir, sous peine de subir le même sort que ses récents prédécesseurs. "Sissi fait rêver les Egyptiens mais s’il n’obtient pas de résultats, s’ils se sentent trahis, ils n’hésiteront pas à descendre dans la rue", estime Antoine Basbous.
Car s’il bénéficie d’une cote de popularité, nombreux sont ceux qui craignent une répression encore plus forte que sous Moubarak. Parmi eux, les anciens de la place Tahrir, symbole de la révolution, qui voient leurs désirs de "liberté" menacés, et les pro-Morsi, qui condamnent leur mise au ban de la société.
Jusqu’à présent, la réponse de Sissi est restée la répression, puisque près de 15.000 manifestants ont été emprisonnés en moins d’un an et plus de 1.400 ont été tués. Un comportement dénoncé par les Occidentaux et l’ONU, qui craignent l’avènement d’une nouvelle dictature.