La campagne pour l'élection présidentielle de jeudi en Algérie s'achève dimanche après des échanges d'une rare violence, le président sortant Abdelaziz Bouteflika accusant de "terrorisme" son principal rival Ali Benflis, qui n'a cessé de dénoncer les risques de fraude.
Les Algériens sont appelés aux urnes jeudi pour élire leur président au cours d'un scrutin a priori sans surprise, M. Bouteflika apparaissant comme le grand favori malgré ses ennuis de santé qui l'ont empêché de mener lui-même campagne.
Les émissaires du président, parfois empêchés de s'exprimer par des opposants à un 4e mandat pour M. Bouteflika, doivent clôturer la campagne dans une salle blanche du complexe olympique de Chéraga, à l'ouest d'Alger, tandis que M. Benflis réunit ses partisans au stade municipal de Rouiba (est).
Absent de la campagne entamée le 23 mars, M. Bouteflika y a apporté samedi soir un ton tout à fait inattendu lors d'une audience accordée au chef de diplomatie espagnole, José Manuel Garcia-Margallo.
D'une voix faiblement articulée, selon les images diffusées par la télévision, il a accusé M. Benflis d'avoir appelé à la violence, osant même le terme de "terrorisme".
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"Qu'un candidat vienne menacer les walis (préfets) et les autorités", disant "de faire attention à leurs familles et à leurs enfants en cas de fraude, cela veut dire quoi", a déclaré M. Bouteflika devant son hôte qui lui faisait remarquer que la campagne avait été dure.
C'est "du terrorisme à travers la télévision", a souligné M. Bouteflika, observant en français que la campagne avait parfois "manqué d'élégance".
Le président faisait allusion à des propos de M. Benflis mercredi sur les risques de fraude électorale. "La fraude est haram (illicite). Le faux et usage de faux est haram. Je m'adresse aux walis, aux chefs de daïras (sous-préfets) : vous avez de la famille, pensez à la préserver", avait-il dit.
- Un "mal incurable" -
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"Soyez vigilants", avait également lancé M. Benflis à l'adresse des électeurs. "Ceux qui se sont habitués à spolier la parole du peuple, à détourner sa volonté, veulent garder leurs vieilles habitudes de la fraude", avait-il insisté.
La fraude est un serpent de mer de tous les rendez-vous électoraux en Algérie. Un ancien préfet vient d'ailleurs de confesser l'avoir pratiquée par le passé à la demande de sa hiérarchie.
"Les révélations fracassantes sur Chourouk TV de l'ancien wali d'Oran Bachir Frik ont choqué l'opinion démocratique", s'est révolté dimanche le quotidien El Watan en évoquant un "mal incurable". "Le phénomène a connu une telle amplitude qu'on parle désormais, presque avec une certaine banalisation dans le propos du +parti de la fraude+ consacré comme le premier parti en Algérie", a ajouté le journal.
Dès le début de la campagne, M. Benflis, ancien Premier ministre connaissant les rouages de l'administration, a prévenu que la fraude serait son "principal adversaire" le 17 avril.
Pour lui, la fraude fut le "vainqueur" et la démocratie "le perdant" de la présidentielle de 2004 dont il était sorti humilié avec seulement 6% des voix, deuxième derrière Bouteflika qui en avait recueilli 85% dès le premier tour.
Affaibli par un AVC qui a nécessité près de trois mois d'hospitalisation en France l'année dernière, M. Bouteflika, 77 ans dont 15 à la tête de l'Algérie, suit une rééducation pour récupérer toutes ses facultés d'élocution et sa mobilité.
Quelques heures avant la charge du président contre M. Benflis, la direction de campagne de M. Bouteflika l'avait aussi accusé de violences.
"Nous prenons acte de la poursuite de comportements violents de la part de parties hostiles au déroulement serein et transparent de la campagne et de l'élection pour la présidentielle, et dénonçons les auteurs de cette violence qui émane de représentants de M. Benflis", avait affirmé l'équipe de M. Bouteflika.
En réaction, M. Benflis a dénoncé un texte "d'une violence inouïe" et d'"une extrême gravité" contenant des "propos diffamatoires" et des "accusations infondées".