A l’occasion du premier anniversaire de l’élection du pape, la journaliste Caroline Pigozzi et le jésuite Henri Madelin publient une édition enrichie de trois chapitres d’Ainsi fait-il (Plon), une enquête au côté du pape François en Amérique latine et dans les coulisses du Vatican. Champion de la communication, c’est aussi un pasteur hors normes, analyse-t-elle.
Dans le «Corriere Della Sera», le pape a récemment déploré l’image de «Superman» qui lui est accolée. Est-il trop idéalisé ?
Il y a là un paradoxe : il déplore un phénomène qu’il alimente lui-même. Le simple fait qu’il vienne de donner une interview de plus le prouve. Toutefois, le pape François n’est pas vaniteux. Il a des intuitions, des fulgurances, et sait capter les idées dans l’air du temps.
Le «buzz» qu’il suscite cache-t-il sa vraie nature ?
Là encore, Jorge Mario Bergoglio a une part de responsabilité. Peut-être fonctionne-t-il un peu trop en mode boulimique ? Il est le talentueux metteur en scène de ses actions, ce qu’il fait très bien. Et pour nous, journalistes, c’est naturellement du pain bénit !
Qu’en est-il de son caractère ?
Le Saint-Père est libre dans sa tête. Il peut s’offrir le luxe de faire souvent la gueule, comme à la messe de Noël ou lors de visites officielles qui l’ennuient. Là est la souveraineté suprême dont rêvent les politiques ! N’oublions pas enfin deux éléments essentiels pour mieux le comprendre : son ancrage latino-américain – il a vécu trois quarts de siècle en Argentine – et son appartenance aux jésuites.
Faut-il s’attendre à une révolution doctrinale sous son pontificat ?
Probablement pas. Le pape François restera dans la lignée de ses prédécesseurs, bien que plus ouvert et tolérant. Mais le changement est notable dans la façon de présenter les choses. Avec lui, on perçoit que c’est d’abord le péché que condamne l’Eglise, et non les pécheurs. Tout en demeurant ferme sur le fond.
A-t-il réussi à s’imposer ?
Vladimir Poutine a déjà été reçu en audience privée. Barack Obama et la reine d’Angleterre sont attendus prochainement. Incontestablement, c’est la figure internationale dont la parole porte loin. Il a notamment fait de la question des migrants un dossier international majeur alors qu’il était quelque peu oublié.
L’engouement médiatique ne fait-il pas oublier sa spiritualité ?
Le pape François est d’une vraie profondeur, mystique à ses heures, fondamentalement «converti» par les pauvres. Il s’agit là d’une dimension clé pour comprendre son personnage.
Caroline pigozzi, journaliste et coauteur du livre «Ainsi fait-il»