Le ministre britannique des Finances George Osborne a averti jeudi les Ecossais que s'ils votaient oui à l'indépendance au référendum de septembre prochain, ils abandonneraient du même coup la livre sterling, une déclaration perçue comme une tentative d'"intimidation" par Edimbourg.
Dans un discours prononcé dans la capitale écossaise Edimbourg, le ministre conservateur s'est opposé frontalement au dirigeant nationaliste écossais Alex Salmond, qui préconise une Ecosse indépendante liée par une union monétaire au reste du Royaume-Uni.
"Les gens doivent savoir que cela ne va pas arriver", a prévenu George Osborne. "Je pense qu'aucun autre chancelier de l'Echiquier (ministre des Finances) n'aurait un point de vue différent", a ajouté le ministre, dont la ligne ferme est soutenue par les trois principaux partis à Londres - les conservateurs ; leurs alliés au gouvernement, les libéraux-démocrates ; et l'opposition travailliste.
"Il n'y a aucune raison légale pour que le reste du Royaume-Uni doive partager sa monnaie avec l'Ecosse" en cas d'indépendance, a encore déclaré George Osborne. "Si l'Ecosse quitte le Royaume-Uni, elle quitte la livre sterling."
Le ministre a comparé le Parti nationaliste écossais (SNP) d'Alex Salmond à un conjoint en colère dans un "divorce houleux". "La livre n'est pas un bien qui se divise entre deux pays après une séparation, comme on le ferait d'une collection de CD", a-t-il dit.
Furieux, Alex Salmond a réagi en dénonçant "une tentative concertée de l'+establishment+ de Westminster (parlement britannique) dirigée par les conservateurs de tyranniser et d'intimider" les Ecossais. "Le peuple écossais ne se fera pas avoir par les fanfaronnades, les intimidations (...) d'Osborne", a-t-il assuré, affirmant que "la réalité était qu'une union monétaire (...) était dans l'intérêt économique du reste du Royaume-Uni". L'absence d'union coûterait des centaines de millions de livres chaque année aux entreprises britanniques, a-t-il prédit.
- Une union bancaire "impossible" -
Dans son discours, George Osborne a abondamment cité le gouverneur de la Banque d'Angleterre (BoE) Mark Carney, qui avait indiqué en janvier qu'une Écosse indépendante devrait céder une partie de sa souveraineté budgétaire pour pouvoir conserver la livre sterling. Il a aussi mis en garde contre le risque de connaître les mêmes difficultés que la zone euro.
"Il y a des preuves selon lesquelles une (union monétaire) ne marcherait pas, elle coûterait des emplois et de l'argent", a encore affirmé le chancelier de l'Echiquier, estimant qu'une telle union "impliquerait de mettre à contribution les contribuables britanniques pour (soutenir) les banques d'un pays étranger".
Un consensus exceptionnel règne sur le sujet au sein des trois partis susceptibles d'être au gouvernement britannique à l'issue des élections de 2015 au Royaume-Uni. Tous font campagne pour le non au référendum sur l'indépendance prévu pour le 18 septembre prochain.
Jeudi, le secrétaire d’État au Trésor, l’Écossais et libéral-démocrate Danny Alexander, a renchéri en disant qu'"une union monétaire exposerait fortement le reste du Royaume-Uni aux risques d'ordre fiscal et financier que représenterait une Ecosse indépendante".
Côté travailliste, Ed Balls, chargé des questions économiques et financières dans son parti, a prévenu qu'en cas de victoire du Labour en 2015, "une union monétaire entre une Ecosse indépendante et le reste du Royaume-Uni ne se produirait pas".
La semaine dernière, le Premier ministre conservateur David Cameron s'était livré à un plaidoyer lyrique, exhortant tous les Britanniques à convaincre les Ecossais de rejeter l'indépendance. Dans un discours prononcé au parc olympique de Stratford à Londres, il avait rappelé les succès obtenus "ensemble" aux JO, et évoqué ses propres racines dans cette région du nord du Royaume-Uni.
Si les récents sondages montrent une progression du oui à l'indépendance, le non reste majoritaire. Selon une enquête dont les résultats sont parus la semaine dernière dans le tabloïd The Sun, 34% des Ecossais sont favorables à l'indépendance et 52% y sont opposés.
L'Ecosse jouit depuis 1997 d'une autonomie accrue au sein du Royaume-Uni. Son parlement a des compétences en matière d'éducation, de santé, d'environnement et de justice. Les questions de défense et de politique étrangère relèvent cependant de Londres.