La survie des éléphants d'Afrique est l'enjeu d'un sommet ministériel organisé au Botswana la semaine prochaine pour coordonner et intensifier la lutte contre les braconniers et les trafiquants d'ivoire, encouragés par la forte demande asiatique.
"L'ampleur du braconnage des éléphants a maintenant atteint de tels niveaux qu'il met en danger les populations", explique l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) qui co-organise le sommet avec le gouvernement botswanais du 2 au 4 décembre.
La déclaration devant être adoptée à Gaborone engagera les Etats signataires --plus d'une trentaine, y compris notamment la Chine ou le Vietnam-- à apporter "un appui politique au plus haut niveau" contre le braconnage et le trafic d'ivoire.
Il resterait actuellement un demi-million d'éléphants en Afrique, contre 1,2 million en 1980 et 10 millions en 1900.
Les braconniers utilisent désormais des armes de guerre, hélicoptères et fusils automatiques. Ils sont d'autant plus motivés que le prix de l'ivoire au marché noir a été multiplié par 10 en dix ans pour dépasser les 2.000 dollars le kilo. Les défenses d'un éléphant mâle de 30 ans, par exemple, pèsent une vingtaine de kilos.
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"La situation est dramatique", s'alarme Stéphanie Vergniault, une Française qui a fondé l'association SOS Eléphants au Tchad, et qui n'hésite pas à affirmer: "Dans dix ans, il n'y aura plus d'éléphants en Afrique!"
L'essentiel de l'ivoire part en Asie, surtout en Thaïlande et en Chine.
Au-delà des enjeux pour la survie de l'espèce, le problème du braconnage se pose aussi en termes de sécurité et de risque terroriste.
L'argent de l'ivoire finance des groupes militaires, comme les shebab somaliens responsables de la spectaculaire attaque d'un centre commercial de Nairobi qui a fait au moins 67 morts en septembre, ou l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) ougandaise ou encore les Janjawids soudanais.
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Le sommet de Gaborone est une étape après la réunion, en mars à Bangkok, de la Convention sur le commerce international des espèces protégées (Cites) qui a montré du doigt le "gang des huit" pays accusés de passivité face au trafic: Kenya, Ouganda, Tanzanie à l'origine, Malaisie, Philippines et Vietnam pour le transit, et bien sûr Chine et Thaïlande à l'arrivée.
Le but est de "maintenir la dynamique entre la dernière réunion de la Cites en mars et la prochaine réunion en juillet de l'année prochaine qui doit décider si huit pays seront sanctionnés pour ne pas avoir mis en oeuvre (les mesures) de la Cites contre le commerce de l'ivoire", indique Lynne Labanne, le responsable de la protection des espèces à l'UICN.
"Il y a des mesures d'urgence qu'il faut prendre et les Etats doivent s'engager", souligne Lamine Sebogo, chef de la délégation du Fonds mondial de la nature (WWF) au Botswana. Il cite notamment une collaboration renforcée entre les Etats, car "un pays seul ne peut pas lutter contre le trafic illicite". Il faut aussi s'assurer que les lois visant braconniers et trafiquants soient durcies et appliquées "avec des pénalités à la hauteur de leurs actes".
"Tuer un éléphant, ça permet de nourrir une famille pendant peut-être vingt ans. Et encore, les braconniers ne touchent qu'une petite partie des profits", renchérit Stéphanie Vergniault. "Or, au Tchad, un braconnier risque trois ans. Il faudrait une peine de vingt ans, si on veut être efficace!"
Enfin, et peut-être surtout, "il faut s'attaquer aux marchés illicites, il faut éradiquer la demande", en lançant un processus permettant de mieux comprendre ce qui motive les acheteurs et mener des campagnes de sensibilisation, souligne Lamine Sebogo.
Il est d'autant plus urgent d'agir que les populations d'éléphants de l'Afrique orientale et australe, jusqu'à présent en sécurité, sont de plus en plus menacées.
Le Botswana, qui abrite plus de 200.000 éléphants et connaît plutôt un problème de surpopulation, se réjouit officiellement d'être un havre de paix. Mais plusieurs centaines de pachydermes ont été empoisonnés en juillet dans le parc zimbabwéen de Hwange, à quelques kilomètres de ses frontières.