En direct
A suivre

En dépit des scandales, les Chinoises privilégient le lait en poudre pour leur bébé

Une maman et son bébé le 8 août 2013 à Pékin [WANG ZHAO / AFP] Une maman et son bébé le 8 août 2013 à Pékin [WANG ZHAO / AFP]

Malgré les scandales touchant son secteur des laits infantiles, la Chine continue d'avoir l'un des taux d'allaitement maternel les plus bas du monde, sur fond de préjugés et de campagnes marketing agressives pour convaincre les femmes de ne pas donner le sein.

Depuis le retentissant scandale du lait frelaté à la mélamine, qui en 2008 avait tué six enfants et rendu malade 300.000, la Chine a enregistré une succession de nouvelles affaires qui ont achevé de ruiner la réputation de son industrie laitière nationale.

Ces craintes ont déclenché une véritable explosion des importations de lait en poudre, en particulier celui destiné aux nourrissons. Le marché du lait pour bébé représentait 1 milliard de dollars en 2002, 9 milliards cette année et on s'attend à ce qu'il atteigne 13 milliards en 2015.

Cette demande gigantesque a récemment provoqué des pénuries à Hong Kong et aussi loin que l'Australie, l'Allemagne, les Pays-Bas ou la Nouvelle-Zélande.

Plusieurs gouvernements ont dû mettre en place des systèmes de quotas tandis que se développait un immense marché noir sur l'internet, des revendeurs en Europe et ailleurs achetant localement des boîtes de lait pour ensuite les revendre au prix fort en Chine.

Car, dans le pays le plus peuplé du monde, seulement 28% des mères allaitent leur enfant durant les six premiers mois de sa vie, un ratio qui tombe à 16% dans les zones urbaines.

C'est nettement moins que la moyenne mondiale de 40%, tandis que ce taux atteint 80% dans des pays comme le Royaume-Uni.

Un enfant "plus intelligent"

Un homme s'occupe d'un bébé le 8 août 2013 dans un quartier résidentiel de Pékin [WANG ZHAO / AFP]
Photo
ci-dessus
Un homme s'occupe d'un bébé le 8 août 2013 dans un quartier résidentiel de Pékin

Pékin s'est rendu coupable d'un "vaste échec marketing" pour promouvoir l'allaitement maternel, estime Robert Scherpbie, responsable de la santé et de l'alimentation à l'Unicef en Chine.

A l'opposé, les fabricants adoptent selon lui des stratégies redoutables.

"Ils affirment renforcer leur substitut au lait maternel par toutes sortes de produits qui favorisent l'apprentissage, rendent votre enfant plus intelligent et incorporent des substances immunogènes, alors que le lait naturel contient déjà toutes ces substances".

La très forte proportion de césariennes en Chine (environ une naissance sur deux) explique aussi la chute de l'allaitement maternel, les nouveau-nés étant davantage séparés de leur mère en raison des suites opératoires.

Les fortes pressions en Chine pour reprendre rapidement le travail après un accouchement participent également à ce résultat.

Yanhong Wheeler, une spécialiste de la question de l'allaitement maternel basée à Pékin, ajoute que les préjugés et l'ignorance compliquent enfin les choses.

"La famille -- en particulier les nouveaux grands-parents et la belle-mère -- a tendance à reprocher à la mère d'affamer le bébé si le problème se pose qu'elle n'a pas assez de lait", explique-t-elle.

Mme Wheeler accuse aussi les fabricants de lait maternisé de pratiquer un "lavage de cerveau" qui ne vise pas seulement la mère mais aussi son entourage.

Selon une enquête réalisée par Beien, un site spécialisé dans les femmes enceintes et les jeunes mamans, plus d'une Chinoise sur deux reçoit des échantillons de lait infantile pendant sa grossesse.

"J'en ai reçu beaucoup d'échantillons, la plupart en petites quantités, et j'ai continué à en recevoir après mon accouchement", a ainsi relaté une jeune mère à l'AFP.

Pour toutes ces raisons les experts ne s'attendent pas à ce que les récents scandales provoquent des changements notables dans la proportion de Chinoises qui allaitent.

La Chine a infligé mercredi de lourdes amendes à six fabricants de lait infantile, majoritairement étrangers, pour entente illicite sur les prix.

Deux jours plus tôt, le géant néo-zélandais Fonterra a présenté ses "profondes excuses" en Chine, après la contamination de certains de ses produits laitiers par une bactérie potentiellement mortelle. Le groupe a assuré que tous les lots concernés avaient été retirés de la vente.

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités