Certains --dont les autorités russes-- s'étaient inquiétés ces dernières années de la radicalisation de son frère aîné Tamerlan, 26 ans, décédé après une confrontation avec la police le 18 avril.
Mais rien de tel pour Djokhar, "Jahar" pour ses amis.
"Un ange" pour son père, un gars "cool", "gentil", "intelligent" pour ceux qui le connaissaient, Djokhar, 19 ans, d'origine tchétchène, avait presque tout de l'étudiant ordinaire.
Tignasse ébouriffée, il avait sa voiture, aimait y écouter de la musique à fond, avait suffisamment d'argent pour parfois partir en virée à New York avec ses amis. Boursier, il vivait sur le campus de l'université du Massachusetts (U-Mass) à Dartmouth, y fréquentait la salle de sports, était aussi connu pour fumer du cannabis et aimer la bière et la fête. Et de son propre aveu, il ne réussissait pas très bien: ses notes étaient insuffisantes dans la plupart des matières.
Son fil Twitter est un condensé de quotidien étudiant banal: manque de sommeil, jeux vidéos, lessive... Il y confie qu'il aime le Nutella, le beurre de cacahuète, trouve Miss America sexy, et deux jours avant l'attentat, qu'il vient de se faire couper les cheveux.
Mais Djokhar admire Tamerlan. Et il est profondément marqué par son histoire familiale.
Musulman d'origine tchétchène, il est né au Kirghizstan, membre d'une diaspora tchétchène déportée dans les années 40 par Staline. Il y passe son enfance avant que sa famille ne déménage au Daguestan, puis, quand il a huit ans, aux Etats-Unis où son père devient mécanicien à Cambridge, près de Boston.
Il avait été naturalisé américain l'an dernier.
Sur VKontakte, un réseau social en russe, un mot décrit sa vision du monde: "l'islam". Mais il affirme aussi que "carrière et argent" sont ce qui compte le plus. On le voit peu à la mosquée.
Il reprend sa routine étudiante
Le 29 avril 2012, sur son compte Twitter, il se dit "fier d'être de Tchétchénie". Et le 31 décembre, il écrit après avoir passé la journée avec un converti à l'islam, "ma religion, c'est la vérité".
Le 14 mars 2012, il tweete "déjà 10 ans en Amérique, je veux partir".
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Mais le mois suivant il est à New York, et confie "New York était génial".
Un mois avant les attentats, il s'était vanté auprès de deux amis kazakhs qu'il savait fabriquer une bombe. Les deux amis, qui l'ont depuis confié aux enquêteurs, ne s'en étaient pas émus.
Quand et comment Djokhar a-t-il basculé ?
Aux enquêteurs, il aurait affirmé qu'il regardait sur internet avec Tamerlan les prêches de l'islamiste radical américain d'ascendance yéménite Anwar Al-Aulaqi, membre d'al-Qaïda tué en septembre 2011 par un drone américain.
C'est aussi sur internet qu'ils auraient appris à fabriquer les bombes qui ont fait trois morts et 264 blessés lors du marathon de Boston le 15 avril.
Après le drame, Djokhar se glisse de nouveau dans sa routine d'étudiant, sans attirer le moindre soupçon.
Il retourne faire du sport. Il se remet à tweeter. "Il n'y a pas d'amour en ville, protégez-vous les gars", écrit-il le 15 avril au soir.
"Je suis pas le genre de mec stressé" sera son dernier tweet, le 17.
Tellement peu stressé ou tellement inconscient que le FBI retrouvera dans sa chambre d'étudiant le blouson et la casquette qu'il portait pour l'attentat.
Le 17 au soir, il passe toute la soirée chez Dias Kadyrbayev et Azamat Tazhayakov, ses amis kazakhs. Le 18, il raccompagne chez lui en voiture Tazhayakov vers 16H00.
Quand le FBI publie peu après 17H00 les photos des frères Tsarnaev, Djokhar qui a quitté peu avant le campus répond avec flegme aux SMS de Kadyrbayev. "lol" (drôle), "tu ferais mieux de ne plus me texter", "viens prendre ce que tu veux dans ma chambre".
Les deux Kazakhs, ainsi qu'un autre ami de Djokhar, ont été arrêtés mercredi pour entrave à la justice: ils sont notamment accusés d'avoir récupéré dans sa chambre son ordinateur et son sac à dos et d'avoir tenté de les faire disparaître.
Accusé d'utilisation d'arme de destruction massive, Djokhar encourt quant à lui la peine de mort.