Le président soudanais Omar el-Béchir effectuait vendredi une courte visite à Juba, la première depuis celle qu'il avait effectuée en juillet 2011 à l'occasion de l'indépendance du Soudan du Sud, un déplacement perçu comme un signe d'apaisement entre les deux pays.
M. Béchir est arrivé vers 10H30 (07H30 GMT) dans la capitale sud-soudanaise, accueilli à l'aéroport par son homologue Salva Kiir, qui lui a présenté son gouvernement. Les deux dirigeants ont immédiatement rejoint le palais présidentiel pour des entretiens dont le contenu n'a pas été dévoilé.
La visite de M. Béchir est aussi la première depuis les graves affrontements frontaliers qui avaient opposé les deux pays au printemps 2012 et fait craindre une reprise d'un conflit à grande échelle entre Juba et Khartoum.
Le Soudan du Sud a conquis son indépendance à l'issue de décennies de guerre civile entre une rébellion sudiste, dont M. Kiir était l'un des commandants, et le pouvoir de Khartoum, dont M. Béchir fut l'un des chefs de l'armée avant de prendre le pouvoir en 1989.
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Les hostitilités ont pris fin en 2005 avec la signature d'un accord de paix qui a débouché sur la partition du Soudan mais a laissé de nombreuses questions en suspens.
Pour la visite du président soudanais, un important dispositif de sécurité a été déployé dès jeudi soir à Juba. Vendredi, excepté les convois officiels, aucun véhicule ne circulait dans les rues de la capitale, flanquées de nombreux policiers. Les piétons étaient eux-mêmes soumis à de réguliers contrôles.
La visite de M. Béchir, plusieurs fois annoncée puis annulée depuis un an, ne doit durer que quelques heures. Le président soudanais doit repartir dans l'après-midi.
Selon l'agence officielle soudanaise Suna, il est à la tête "d'une délégation de haut niveau", dont font notamment partie les ministres soudanais de la Défense, de l'Intérieur, du Pétrole et le chef des renseignements soudanais.
Rétablir la confiance
Depuis l'accès du Soudan du Sud à l'indépendance le 9 juillet 2011, de nombreux différends continuent d'empoisonner les relations des deux anciens ennemis, notamment les questions de la démarcation de la frontière commune, de la région contestée d'Abyei ou encore du pétrole.
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Juba a hérité des trois-quarts des réserves pétrolières du Soudan d'avant la partition, mais n'a jamais pu se mettre d'accord avec Khartoum sur le montant des redevances à lui verser pour emprunter ses oléoducs et exporter.
Ce différend pétrolier a dégénéré en janvier 2012, quand, faute d'accord et furieuse de voir le Soudan prélever du brut au passage dans ses oléoducs, le Soudan du Sud a stoppé net sa production. L'arrêt de la production a mis les économies des deux pays à genoux.
Les violents affrontements frontaliers du printemps 2012 avaient eux opposé les armés des deux pays dans la région pétrolifère d'Heglig, revendiquée par les deux parties.
La visite de M. Béchir intervient dans la foulée de la signature en mars d'un accord à Addis Abeba qui a permis la mise en place d'un calendrier pour relancer les relations bilatérales et la reprise samedi dernier de la production pétrolière sud-soudanaise. Selon les médias soudanais, le brut devrait pouvoir à nouveau être exporté depuis Port-Soudan, sur la mer Rouge, d'ici fin mai.
Un précédent accord avait déjà été signé en septembre entre Khartoum et Juba, mais n'avait jamais été appliqué. Au coeur du blocage, figuraient les garanties que Khartoum réclamait de Juba sur un autre sujet de discorde : le soutien sud-soudanais aux rébelles actifs dans les Etats soudanais du Kordofan Sud et du Nil Bleu (sud).
Après la signature de l'accord dans la capitale éthiopienne en mars, M. Kiir avait téléphoné à M. Béchir pour l'inviter à Juba. La date de la visite a été confirmée mardi.
Selon le ministre soudanais de l'Information Ahmed Bilal Osman, cité par Suna, "la visite intervient à un moment politique propice" et va aider surmonter "le manque de confiance" entre les deux parties.