La militante basque française Aurore Martin a regagné dans la nuit de samedi à dimanche les Pyrénées-Atlantiques après sa remise en liberté samedi en Espagne, au terme de 52 jours de prison qui ont suscité au Pays basque français une mobilisation dépassant le milieu nationaliste.
Aurore Martin, qui avait quitté après 17H00 la prison de Soto del Real, au nord de Madrid, est arrivée peu après minuit à Saint-Jean-Pied-de-Port, à 50 km de Bayonne, où elle a rendu une brève visite à des sympathisants réunis dans un bar, a constaté un photographe de l'AFP
La militante de 33 ans y a été reçue par un "aurresku" impromptu, une danse basque de bienvenue, par près de 50 personnes qui lui ont remis un bouquet de fleurs. Puis elle est repartie en voiture, avec sa soeur Emilie et plusieurs proches, sans faire de déclaration.
Une source du mouvement Batasuna, auquel Aurore Martin appartient, a confirmé par la suite à l'AFP qu'elle était "bien arrivée" parmi ses proches.
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Cette source n'a pas précisé où Aurore Martin séjournerait, dans son village ou auprès de parents à Mauléon ou Bayonne. Elle ne fera pas de déclaration avant plusieurs jours, au moins avant Noël, a assuré cette source.
La justice espagnole avait annoncé vendredi la remise en liberté contre caution de 15.000 euros de la militante nationaliste, qui avait été arrêtée le 1er novembre lors d'un contrôle routier de gendarmerie à Mauléon puis remise à Madrid, en vertu d'un mandat d'arrêt européen.
"Nous sommes très contents qu'Aurore Martin ait été libérée", a déclaré à l'AFP Jean-François Lefort, porte-parole de Batasuna, ajoutant: "Nous rappelons qu'elle a été incarcérée deux mois pour un délit d'opinion".
Libérée sous contrôle judiciaire, la jeune femme peut résider en France mais devra disposer d'une domiciliation en Espagne et pointer entre le 1er et le 5 de chaque mois au tribunal de sa domiciliation espagnole.
L'arrestation de cette militante de profil mineur, pour des faits répréhensibles en Espagne mais pas en France (participation à des réunions de Batasuna, considéré par Madrid comme bras politique de l'ETA), avait causé un émoi considérable au Pays basque français, mobilisant des élus de gauche comme de droite pour sa libération.
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Samedi encore, plusieurs de ces élus sont venus apporter une contribution en espèces à une collecte organisée par Batasuna pour payer la caution, dans des bars de Bayonne et Saint-Jean-Pied-de-Port, a constaté l'AFP. Selon Batasuna, 450 personnes ont contribué, et les 15.000 euros ont été atteints.
Le public était très diversifié, pas obligatoirement nationaliste, à l'image d'un couple de retraités déposant son obole en disant à l'AFP: "On n'est pas forcément pour Batasuna, mais on veut qu'Aurore Martin rentre chez elle".
Europe Ecologie les Verts, dont deux parlementaires avaient rendu visite à Aurore Martin en prison, s'est "félicité" de sa libération, "moment de soulagement et de joie". EELV a appelé à "poursuivre la mobilisation" pour l'abandon des poursuites à son encontre.
Le PCF s'est également réjoui, estimant que la "peu glorieuse affaire" Aurore Martin a "entaché nos valeurs républicaines". Il a dénoncé l'usage du mandat d'arrêt européen, selon lui "conçu contre les terroristes et non pas pour mettre des Aurore Martin en prison".
Frédérique Espagnac, députée PS des Pyrénées-Atlantiques, a souhaité "Joyeux Noël à Aurore Martin et toute sa famille". Elle a salué "la diplomatie silencieuse (qui) a été efficace".
Les deux élus ont souhaité que cette libération annonce un "apaisement" au Pays basque.
L'émoi autour du cas Aurore Martin y avait contrasté avec le climat du processus de paix, depuis le renoncement de l'ETA à la lutte armée en octobre 2011, et son offre en novembre de négocier sa "dissolution", en contrepartie d'un rapprochement des prisonniers basques notamment.
Interrogé sur les suites judiciaires, Jean-François Lefort (Batasuna) a estimé que ce serait "une vraie erreur politique que Paris et Madrid s'entêtent à juger des militants, comme Aurore Martin, qui avec d'autres forces politiques, construisent la paix".