Le président roumain Traian Basescu a chargé lundi son rival, le Premier ministre sortant Victor Ponta, de former un nouveau gouvernement, éloignant les craintes d'une nouvelle crise politique dans le plus jeune Etat membre de l'Union européenne.
La coalition de centre gauche conduite par M. Ponta, l'Union sociale-libérale (USL), a remporté une large victoire lors des élections législatives du 9 décembre avec près de 60% des voix.
"Vu que les représentants des partis politiques ayant participé lundi aux consultations ont formulé une seule proposition, M. Basescu a désigné M. Victor Ponta comme candidat au poste de Premier ministre", a indiqué la présidence dans un communiqué.
Le président avait à plusieurs reprises laissé entendre qu'il ne reconduirait pas dans ses fonctions M. Ponta, le qualifiant de "mythomane" et l'accusant de tenir un double discours sur l'ancrage européen de la Roumanie, pro-européen à l'étranger, plus nationaliste à l'intérieur.
Mais nombre d'analystes politiques ont estimé qu'un refus de nommer M. Ponta constituerait un "abus de pouvoir" qui plongerait la Roumanie dans une nouvelle crise après les turbulences de cet été.
Deux mois à peine après être arrivé au pouvoir à la suite d'une motion de censure, l'USL avait tenté de destituer le chef de l'Etat, s'attirant les critiques virulentes de Bruxelles et des Etats-Unis.
M. Basescu a évité lundi d'annoncer personnellement la désignation du nouveau Premier ministre, laissant le soin à son service de presse d'émettre un simple communiqué.
La cohabitation entre les deux hommes s'annonce houleuse, même si M. Ponta a assuré que la hache de guerre avait été enterrée et qu'il travaillerait sans problème avec M. Basescu, dont le mandat court jusqu'à la fin 2014.
M. Ponta dispose désormais de 10 jours pour demander le vote de confiance du parlement sur son équipe.
Selon un responsable de l'USL, Liviu Dragnea, "il est important d'avoir un gouvernement" avant Noël.
Les formations membres de l'USL --les sociaux-démocrates (PSD, gauche) de M. Ponta, les libéraux (PNL, droite) et le petit Parti conservateur (PC)-- ont déjà lancé des pourparlers sur le partage des ministères.
Seule inconnue, la participation ou non de l'Union démocratique des Magyars de Roumanie (UDMR) au gouvernement.
M. Ponta avait tendu une main à cette formation représentant les quelque 1,4 million de Hongrois de souche du pays dès la clôture du scrutin, affirmant souhaiter une collaboration au gouvernement.
Mais son geste a aussitôt a suscité des critiques dans le camp des libéraux, qui se sont déclarés contre la nomination de ministres émanant de l'UDMR.
Le gouvernement Ponta no.2 devra se pencher sur l'économie, alors que la Roumanie, deuxième pays le plus pauvre de l'UE, peine à renouer avec une croissance durable.
M. Ponta a déjà annoncé qu'il entendait négocier un nouvel accord avec le Fonds Monétaire International (FMI) et l'Union européenne, lorsque l'arrangement en cours expire en mars, afin de rassurer les investisseurs et les marchés sur la poursuite des réformes.
Un premier test des intentions du nouveau gouvernement sera le projet de budget 2013 qui devrait être soumis au Parlement à la mi-janvier.
La lutte contre la corruption et la poursuite de la réforme de la justice devraient également figurer parmi les priorités du nouvel exécutif alors que la Commission européenne qui surveille de près ce dossier, doit publier prochainement un rapport crucial pour l'ambition de Bucarest de rejoindre l'espace Schengen de libre circulation.
Les Etats-Unis ont rappelé la semaine dernière qu'ils attendent que la Roumanie "tienne ses promesses" en matière de respect de l'Etat de droit et de réformes économiques pour éviter de "rejouer" la crise de l'été.