La commission d'enquête sur le massacre de mineurs en grève à Marikana (nord) en août a reporté mercredi une audition cruciale des experts de la police scientifique, alors que des grèves parfois violentes continuent de paralyser des secteurs-clés de l'économie sud-africaine.
Le juge Ian Farlam, qui préside la commission "Marikana", a accédé aux demandes des avocats des familles de reporter l'audition des experts qui ont travaillé sur les lieux de la fusillade, où les forces de l'ordre ont abattu 34 grévistes de la mine de platine de Lonmin, le 16 août.
"Cette commission enquête sur des décès", a dit l'un des avocats des familles, Dumisa Ntsebeza. "Il ne serait pas correct que nous menions une enquête sur ces décès alors que les familles ne sont pas là".
La plupart des proches des victimes vivent dans des provinces éloignées, voire à l'étranger. Beaucoup de mineurs du bassin minier de Rustenburg (nord) sont originaires de la région rurale du Cap oriental, le long de la côte de l'Océan indien.
Selon l'avocat, les premières familles pourraient arriver lundi 8 octobre.
La commission d'enquête a ouvert ses travaux lundi et doit siéger quatre mois.
Mercredi, elle a reçu les rapports d'autopsie de 33 des 34 victimes du 16 août.
Ces autopsies répondront peut-être à l'une des questions primordiales sur le massacre de Marikana : les mineurs ont-ils tous été tués lors de la fusillade sur leur lieu de rassemblement ? Une partie d'entre eux ont-ils été poursuivis et abattus de sang froid par les policiers ultérieurement ?
Des témoins, dans les semaines ayant suivi la tuerie, ont accrédité la seconde hypothèse, affirmant que les policiers avaient pourchassé les mineurs qui s'enfuyaient après la fusillade pour les abattre à bout portant.
Les événements de Marikana, partis d'une grève sauvage pour obtenir des augmentations salariales, ont fait au total 46 morts.
Dix personnes dont deux policiers ont été tuées entre le 10 et le 12 août dans des affrontements intersyndicaux. Un responsable syndical a été retrouvé battu à mort, début septembre, et une femme est décédée après avoir été touchée à la jambe par une balle en caoutchouc tirée par la police lors d'un rassemblement interdit le 15 septembre.
Ce sanglant conflit social s'est terminé par un accord prévoyant de substantielles augmentations de salaires, de 11 à 22% selon les catégories de mineurs.
Ces événements ont suscité dans le pays une vague de grèves sauvages, d'abord dans les mines, essentiellement dans le secteur du platine et de l'or, deux des principaux pourvoyeurs de devises de l'Afrique du Sud.
Le mouvement continue dans plusieurs géants du secteur, dont la production est interrompue. Cinq personnes ont été tuées dans des violences liées à ces grèves en début de semaine.
Mercredi, la mine d'or Gold One a annoncé avoir suspendu "1.300 à 1.400 de ses 1.800 employés" en grève illégale sur son site de Ezulwini, près de Johannesburg.
Depuis deux semaines, les transporteurs routiers sont également en grève, et les premières pénuries de carburant commencent à se faire sentir dans les grands centres urbains, notamment dans la région de Johannesburg-Pretoria, poumon économique du pays. Nombre de distributeurs automatiques de billets sont également vides.
Plusieurs véhicules ont été caillassés ou incendiés depuis le début de la grève, et les violences ont fait au moins une dizaine de blessés.
Mercredi matin, la Chambre de Commerce et d'Industrie sud-africaine a présenté un indice mensuel de confiance des entreprises en forte baisse. Cet indice BCI (Business confidence index) pour septembre est à son second plus bas niveau depuis 2005. Il est tombé à 91,7 points, soit 3,3 points de moins qu'en août et 6,7 points de moins qu'en septembre 2011.