Un cadavre a été découvert mardi, portant à 45 morts le bilan du conflit social de Marikana, alors que le jeune tribun Julius Malema a exhorté les mineurs sud-africains à lancer une grève nationale de cinq jours par mois pour obtenir des augmentations de salaire.
"Le corps d'un homme a été trouvé mort. (...) Il semble avoir frappé par un objet tranchant", a indiqué à l'AFP le porte-parole de la police Thulani Ngubane.
"Nous ne savons pas s'il a été tué hier (lundi) ou cet après-midi", a-t-il ajouté.
L'agence radio Eyewitness News a précisé que le corps avait été trouvé gisant face contre terre non loin de la colline où les grévistes ont l'habitude de se réunir, avec deux coupures profondes derrière la tête.
"Les mineurs avaient l'air en colère, mais ils ignoraient le cadavre qui était à quelques mètres d'eux", a décrit une journaliste de la radio sur place.
Le bilan du conflit de Marikana (nord), qui empoisonne la vie politique et sociale sud-africaine depuis plus d'un mois, atteint donc 45 morts: 10 hommes --dont deux policiers et deux gardes de sécurité-- tués dans des affrontements intersyndicaux au début des événements, puis 34 autres abattus par la police le 16 août.
La journée de mardi a été tendue sur place. La journaliste d'Eyewitness News a également raconté qu'une femme a été prise à partie par des grévistes dans la matinée parce qu'elle prenait des photos: ils croyaient qu'elle était une espionne de la direction.
Un groupe de mineurs armés de machettes, de bâtons, d'arcs et de lances a marché dans l'après-midi vers l'hôpital de la mine.
Loyiso Mtsheketshe, l'un de leurs meneurs, a dit à l'agence Sapa qu'ils voulaient demander à l'hôpital d'arrêter de livrer les mineurs blessés à la police.
La police avait arrêté 260 personnes sur les lieux après la fusillade du 16 août --qui avait fait 78 blessés, en plus des 34 morts--, puis en avait à nouveau arrêté 10 autres à leur sortie de l'hôpital.
Ces 270 hommes avaient d'abord été inculpés, entre autres, du meurtre de leurs camarades abattus par la police, en vertu d'une bizarrerie juridique héritée de l'apartheid. Ils ont ensuite été libérés, l'inculpation ayant été suspendue, et certains d'entre eux ont accusé la police de maltraitance.
Les négociations sont parallèlement au point mort, les quelque 3.000 foreurs restant sur leur position: ils veulent avant toute chose le triplement de leur salaire à 12.500 rands (1.200 euros) par mois. Embarqués dans une grève sauvage entrée dans sa cinquième semaine, il empêchent les non-grévistes de travailler.
A une centaine de kilomètres de là, le jeune tribun populiste Julius Malema a appelé tous les mineurs d'Afrique du Sud à se mettre en grève pour réclamer eux aussi 12.500 rands par mois.
"La lutte de Marikana doit s'étendre à toutes les mines! (...) Les patrons blancs, s'ils n'accèdent pas à votre demande, nous allons faire grève cinq jours par mois jusqu'à ce que nous obtenions 12.500" rands, a-t-il lancé devant quelques milliers de grévistes de la mine d'or de KDC, exploitée par le groupe Gold Fields, près de Carletonville à l'ouest de Johannesburg.
"Vous devez rendre les mines ingouvernables!", a lancé l'ancien président de la Ligue de jeunesse de l'ANC, exclu du parti au pouvoir en avril, qui est parti en croisade contre ses anciens amis, et leurs alliés des syndicats dominants.
Il les accuse notamment d'avoir trahi la base en devenant actionnaires des compagnies minières.
"C'est une révolution sérieuse, n'abandonnez pas", a-t-il exhorté.
"Juju", très populaire parmi les grévistes, n'occupe formellement aucune fonction lui permettant de parler au nom des mineurs ou de décider d'une action. Il a annoncé qu'il poursuivrait sa tournée des mines de la région.
"Nous avons besoin de lui pour nous motiver. Car c'est l'enfer, chaque jour nous risquons notre vie, pour ne rien gagner à la fin de la journée", a estimé un mineur de KDC, qui veut se faire appeler KVM.
"Ce qui est arrivé à Marikana nous a donné du courage", souligne-t-il.
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