Le gouvernement allemand est monté au créneau vendredi pour tenter de calmer la polémique désormais internationale provoquée par une décision judiciaire condamnant la circoncision religieuse.
"Au nom de ce gouvernement, de tous les membres de ce gouvernement, disons les choses clairement: nous tenons à ce qu'une vie religieuse juive, à ce qu'une vie religieuse musulmane soient possibles en Allemagne", a déclaré vendredi le porte-parole de la chancelière Angela Merkel, Steffen Seibert, lors d'un point de presse gouvernemental régulier.
C'est la première fois que ce dernier prend la parole à ce sujet depuis que le tribunal de Cologne (ouest) a rendu publique fin juin une décision qui pourrait faire jurisprudence et assimile la circoncision religieuse d'un enfant à une atteinte corporelle, passible de poursuites pénales.
"La liberté des activités religieuses est à nos yeux un droit auquel nous sommes très attaché", a ajouté M. Seibert, jugeant "urgent de rétablir un climat juridique pacifié" à ce sujet.
Dans un tweet écrit quelques minutes après la fin du point-presse, M. Seibert s'est montré encore plus clair: "les circoncisions des garçons ne doivent pas pouvoir faire l'objet de poursuites pénales".
Depuis l'annonce de la décision de Cologne, la polémique est très vive dans un pays qui compte compte quelque 4 millions de musulmans et une communauté juive de plus de 200.000 personnes.
La plupart des grandes organisations musulmanes locales et le Conseil central des Juifs d'Allemagne ne cessent de dénoncer un jugement qui porte, selon elles, atteinte à leur liberté religieuse.
Cette semaine, leur colère a trouvé un écho à l'échelle internationale.
De source diplomatique allemande, le jugement est d'ailleurs considéré comme un "désastre" pour l'image du pays, notamment au regard de son lourd passé national-socialiste.
Mardi, c'est une quarantaine de rabbins orthodoxes venus de toute l'Europe qui ont par exemple dénoncé à Berlin une décision qui "est peut-être l'attaque la plus grave contre la vie juive en Europe depuis l'Holocauste", selon les termes du rabbin Pinchas Goldschmidt, de Moscou.
Par ailleurs, dans un appel rendu public mercredi, rare dans son expression commune, les leaders de plusieurs organisations juives et musulmanes, comme le Centre rabbinique d'Europe, l'Association juive d'Europe (EJA), le forum "Parlement juif européen" ou le Centre islamique de Bruxelles se tournent vers le Parlement allemand afin qu'il légifère rapidement.
Ces organisations, bien que peu représentatives, affirment avoir alerté des députés européens d'Allemagne, Finlande, Belgique et Pologne.
Israël qui a noué d'étroites relations diplomatiques avec l'Allemagne, observe avec attention l'évolution du débat.
Le ministre de la Diplomatie publique et de la Diaspora, Youli Edelstein, a par exemple déclaré à l'AFP à Jérusalem qu'une interdiction de la circoncision était "d'un point de vue juif, la plus importante de toutes les interdictions imaginables".
"Si on laisse passer ça (en Allemagne, ndlr), il n'y aura pas de possibilité de l'empêcher dans d'autres pays européens", a-t-il jugé.
Il s'est montré cependant optimiste, estimant que les Allemands étaient tout à fait conscients "qu'il n'était pas opportun pour leur pays d'interdire les circoncisions".
Vendredi, une porte-parole du ministère allemand de la Justice a précisé que ce dernier allait procéder à "un examen juridique approfondi" de la décision de Cologne, faisant état de "trois options" pour une éventuelle loi.
A la question de savoir dans quel délais le problème pourrait être réglé, le porte-parole de la chancelière a précisé: "cela ne doit pas traîner".