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Ex-Yougoslavie : encore des milliers de suspects à juger

L'ancien général serbe de Bosnie, Ratko Mladic devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), le 3 juin 2011 à La Haye[TPIY/AFP/Archives]

Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) démarre mercredi son avant-dernier procès, celui contre l'ancien général serbe de Bosnie, Ratko Mladic, mais les justices des Balkans devront juger encore des milliers de suspects de crimes de guerre.

Mis en place en 1993 par l'ONU avec pour mission de juger les plus hauts responsables, le TPIY doit fermer ses portes fin 2014. La mission des justices locales, chargées des dossiers moins importants, s'étendra dans le meilleur des cas sur plus d'une décennie, estiment des experts.

"Nous (juges et procureurs) avons toujours existé, mais il n'y a pas eu de volonté politique pour qu'on fasse notre travail" à l'époque des conflits, affirme le procureur serbe pour crimes de guerre, Vladimir Vukcevic.

"Si on avait fait notre travail, Srebrenica, Sarajevo et Vukovar n'auraient pas eu lieu", ajoute-t-il en mentionnant les lieux des pires massacres durant les conflits de Bosnie (1992-95) et Croatie (1991-95).

Plus de 130.000 personnes ont été tuées dans les conflits qui ont suivi l'éclatement de la Yougoslavie dans les années 1990, dont quelque 100.000 en Bosnie.

A ce jour, la justice serbe a inculpé 145 personnes, dont 63 ont été condamnées à des peines de prison.

En Bosnie, la Cour d'Etat compte pas moins de 4.500 suspects, précise son procureur Dragan Corlija. Dans mille autres dossiers, les enquêtes n'ont pas encore démarré, ou les auteurs ne sont pas connus.

Sept ans après la mise en place de cette cour, 240 personnes ont été inculpées, et seulement 90 verdicts définitifs ont été prononcés.

"Des criminels (de guerre) se promènent dans les rues à travers la Bosnie. Ce n'est pas un secret", remarque Yury Afanasiev, un responsable de l'ONU impliqué dans des projets de renforcement de la justice bosnienne.

Le gouvernement bosnien a adopté en 2008 une stratégie visant à achever en 15 ans la plus grande partie des affaires de crimes de guerre, mais plus personne ne croit à ce délai.

"La Cour d'Etat (...) ne réussira pas seule et un appui à tous les niveaux de justice est nécessaire", a déclaré récemment à Sarajevo le procureur du TPIY, Serge Brammertz.

Ainsi, nombre de dossiers devront être cédés à une quinzaine de tribunaux régionaux, précise un magistrat local, Milorad Novkovic.

"La réconciliation des peuples de Bosnie (Serbes, Croates, musulmans, ndlr) dépend du succès de la stratégie", dit-il.

Dans les Balkans, à l'exception des procès "plaider coupable", qu'ils émanent du TPIY ou des tribunaux locaux, les verdicts sont constamment contestés et les condamnés sont souvent considérés comme des héros innocents par leurs communautés.

"Tout le monde soutient le principe de la punition des crimes des guerre (...) mais chaque communauté refuse d'accepter que des crimes aient été commis par son camp", explique l'analyste Esad Hecimovic.

En Bosnie, le mandat des procureurs et juges internationaux engagés auprès de la justice bosnienne s'achève fin 2012. Au Kosovo, en revanche, ces dossiers sont toujours gérés par des magistrats internationaux.

Souvent critiquée par Bruxelles pour la gestion de ce genre de procès, la Croatie, qui doit adhérer à l'Union européenne en 2013, a nettement amélioré la situation sous la pression du processus d'adhésion, selon des ONG locales.

Dans la région, des dizaines de suspects abusent de leur double nationalité pour fuir d'un pays à l'autre, profitant de l'absence de traités d'extradition.

Les parquets espèrent que leurs pays signeront prochainement des accords leur permettant de juger les suspects dans le pays de résidence et de mettre ainsi fin à leur impunité.

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