À l’occasion de la niche parlementaire du parti Horizons prévue ce jeudi 14 mars, les députés du groupe envisagent de déposer une proposition de loi visant à assouplir les règles du non-cumul des mandats.
En vigueur depuis le 14 février 2014, la loi sur non-cumul des mandats est régulièrement débattue en France. Alors que la niche parlementaire du parti Horizons se tiendra ce jeudi 14 mars, les députés du groupe souhaitent revenir sur les conditions qui prescrivent le droit d’un député à cumuler un mandat national et un mandat régional ou communal. Une proposition de loi en ce sens sera déposée ce jeudi à l’Assemblée nationale.
Deux lois contraignantes
Dans le détail, deux lois sur le non-cumul des mandats ont été promulguées en 2014 : une loi organique qui interdit l’exercice de fonctions exécutives locales (y compris maire d’arrondissement, délégué ou adjoint) par un député ou un sénateur, et une loi ordinaire qui pose les mêmes incompatibilités pour les députés européens. Ces textes interdisent également aux députés nationaux, européens, et aux sénateurs de cumuler leur mandat avec des fonctions locales dites «dérivées» comme des fonctions de président ou de vice-président d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou d’un syndicat mixte ; de président ou de vice-président de conseil départemental, ou encore de président ou de vice-président de conseil régional.
Ils ne peuvent pas non plus exercer des fonctions de président ou membre du conseil exécutif de Corse, de président de l’assemblée de Corse, mais aussi de président, vice-président ou membre des exécutifs locaux en outre-mer, ainsi que président ou vice-président des assemblées d’outre-mer. Il en va de même pour les fonctions de président ou vice-président de l’organe délibérant de toute autre collectivité territoriale créée par la loi (notamment les métropoles) ; et enfin de président de l’Assemblée des Français de l’étranger, de membre du bureau de cette Assemblée, ou encore de vice-président de conseil consulaire.
En cas de situation de cumul, le parlementaire doit démissionner sous 30 jours du mandat ou de la fonction qu’il détenait avant (par exemple un maire élu député doit obligatoirement démissionner de sa fonction de maire). À défaut, le mandat le plus ancien cesse d’office. Par ailleurs, un parlementaire démissionnaire pour cause de cumul de mandats est désormais remplacé par son suppléant. Jusque-là, une élection partielle devait être organisée. L’ensemble de ces incompatibilités s’applique aux députés nationaux depuis juin 2017, aux sénateurs depuis octobre 2017 et aux députés européens depuis les élections de mai 2019.
Le camp présidentiel divisé
Selon les députés Horizons, le non-cumul des mandats entraîne notamment une déconnexion des parlementaires du fait d'un manque d'ancrage local, ainsi qu’un manque de relais pour les citoyens. La proposition de loi qui sera déposée par le groupe viendrait donc assouplir les règles et permettre le cumul d'un mandat national avec celui d'adjoint au maire ou de vice-président de région ou de département.
Sur ce sujet, poussé par la droite et le Rassemblement national, contrairement à la gauche, qui y est globalement hostile, la position du gouvernement n'est pas arrêtée, fait-on savoir au ministère déléguée aux Collectivités. Mais le camp macroniste est divisé sur la question. Si Emmanuel Macron y est favorable, la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet y est fortement opposée. Elle qualifie cette proposition de loi de «retour en arrière» et estime que le non-cumul a été «un facteur clé de féminisation de l’Assemblée». Même position pour l’ancien ministre Clément Beaune : «notre marqueur, c’est le renouvellement politique», a-t-il rappelé, avant de préconiser de «ne pas sauter sur toutes les conneries qui passent» à trois mois des européennes.
Une «spécificité française»
Historiquement, la «culture du cumul» est ancienne et elle s’est renforcée tout au long de la Ve République. En 2012, 476 députés sur 577 (82%) et 267 sénateurs sur 348 (77%) étaient en situation de cumul. À l’époque, ces chiffres faisaient de la France une exception en Europe, où le cumul des mandats électoraux est interdit ou très limité. Les lois adoptées en 2014 ont marqué une rupture en mettant fin à cette «spécificité française».
Les lois de 2014 ont également eu un impact important sur le renouvellement du personnel politique en 2017, puisqu'au lendemain des élections législatives, plus de 38% des députés ont dû cesser leur mandat exécutif local. D'autres ont préféré ne pas se représenter à la députation pour ne pas perdre la tête de leur mairie ou département. Quant aux sénateurs, qui étaient hostiles à la réforme, une grande majorité d’entre eux ont privilégié leur mandat national.