Le tribunal correctionnel de Paris a condamné Adecco à 50.000 euros d’amende, ce mercredi 13 mars. L’agence d’intérim avait mis en place un système permettant de filtrer les candidats noirs, entre 1997 et 2001.
Une condamnation après 23 ans de lutte judiciaire. À Paris, le géant mondial de l'intérim Adecco a été condamné mercredi 13 mars 50.000 euros d'amende pour discrimination à l'embauche et fichage à caractère raciste, plus de 20 ans après les faits.
C’est «un faisceau d’indices» permettant d’établir l’existance d’un fichage ethnique et d’une discrimination, qui a permis au tribunal correctionnel de Paris de rendre sa décision.
Avec deux de ses cadres, le groupe franco-suisse Adecco était poursuivis par d'anciens salariés ainsi que des associations antiracistes, pour avoir mis en place un système de discrimination fondé sur la couleur de peau.
Un fichier «PR4» pour les employés noirs
En effet, un fichier «PR4», comportait les noms d'intérimaires très majoritairement noirs, et d’une minorité de personnes maghrébines à la peau foncée.
Ainsi, 500 intérimaires noirs avaient été écartés de certaines missions entre 1997 et 2001 : «Apprendre que j'avais été discriminée, ça m'a blessée, ça m'a fait mal (...). Je ne me réduis pas à une couleur de peau», s’est souvenue en pleurs Assa, l’une d’entre elles.
C’est en 2001 qu’une information judiciaire avait été ouverte à Paris, après une plainte de l'association SOS Racisme, qui avait été alertée par un ancien salarié chargé du recrutement dans l’entreprise.
Les deux anciens directeurs également condamnés
Lors du procès, les prévenus et anciens directeurs de l’agence, Olivier Poulin et Mathieu Charbon, avaient soutenu que le code «PR4» n’était pas affilié à la couleur de peau mais à «un mix de l'expérience professionnelle et du savoir-être du candidat», notamment sa maîtrise du français.
Des explications bien «fantaisistes», qui avaient suscité une allusion ironique de la part de la procureure : «Il faut avoir envie d'y croire», avait-elle déclaré.
Tous deux ont été condamnés à 10.000 euros d'amende, dont 7.000 avec sursis. Le tribunal a ainsi reconnu leur implication dans ce «filtrage basé sur la couleur de peau» sans en avoir été à l'origine, mais tout en n'ayant «rien mis en place pour y mettre fin».
Adecco a indiqué à l’AFP prendre «acte de cette décision», assurant mener «une politique résolue de lutte contre les discriminations depuis plusieurs années».