A la suite de leur entretien avec Emmanuel Macron, organisé ce jeudi pour discuter du soutien de la France à l’Ukraine, les différents chefs de parti ont dénoncé la posture «irresponsable» du président de la République, ne cachant pas leur inquiétude.
«Je suis arrivé inquiet et je suis ressorti plus inquiet encore». Tels ont été les mots du coordinateur de La France insoumise Manuel Bompard après son entretien avec Emmanuel Macron ce jeudi 7 mars. Alors que le chef de l’Etat recevait à l’Élysée les chefs de parti pour aborder la question de l’aide de la France à l’Ukraine, en guerre contre la Russie, les différents participants n’ont pas semblé convaincus à la sortie de cette réunion.
«Le président de la République est prêt à un soutien sans limite et semble-t-il jusqu'au-boutiste à l'Ukraine, il n'y a aucune limite et aucune ligne rouge», a déploré Jordan Bardella, président du Rassemblement national.
Emmanuel Macron a en effet assumé ses propos du 26 février, lorsqu’il avait affirmé que l’envoi en Ukraine, à l’avenir, de troupes occidentales au sol ne devait pas «être exclu». La plupart des autres alliés de Kiev s'étaient démarqués de cette position, tout comme les opposants en France.
«Face à un ennemi qui ne se met aucune limite, nous ne pouvons nous permettre d'en formuler», a-t-il déclaré aux chefs de l'opposition, selon l'entourage du président à CNEWS, défendant «une position proportionnée au regard du durcissement russe».
Une posture «inappropriée»
C’est à l’unisson que les opposants au chef de l’Etat se sont indignés de son discours. Le président du parti Les Républicains Eric Ciotti a dénoncé une posture présidentielle «inopportune, inappropriée, voire irresponsable», qui a «isolé notre pays».
Selon le patron des communistes Fabien Roussel, Emmanuel Macron a notamment esquissé, carte à l'appui, le scénario d'une avancée du front «vers Odessa ou vers Kiev», «ce qui pourrait engager une intervention» pour arrêter la Russie.
«C'est vraiment un problème d'amateurisme à ce stade-là», a renchéri la cheffe des Écologistes Marine Tondelier, évoquant une «déclaration viriliste».
Si les principales oppositions se sont toutes indignées des propos d'Emmanuel Macron, elles ont cependant toutes dit qu'il fallait «apporter un soutien indéfectible à l'Ukraine».
La veille, Emmanuel Macron avait reçu ses prédécesseurs Nicolas Sarkozy et François Hollande à l'Elysée pour aborder la situation internationale. Après son entretien, l’ancien président socialiste avait indiqué avoir mis en garde l’actuel chef de l’Etat. «Moins on en dit, mieux on agit», déclarait-il à la presse.
Un débat houleux à venir au Parlement
Le Parlement doit désormais débattre de la position de la France dans le conflit russo-ukrainien, le 12 mars à l’Assemblée nationale et le 13 au Sénat. Des discussions qui seront suivies, à chaque fois, d’un vote.
Ce débat s'annonce agité. Non pas tant au sujet de l'accord bilatéral de sécurité signé mi-février avec l'Ukraine, sur lequel porte formellement le vote, mais en raison des récentes déclarations du président, qui a aussi appelé les alliés occidentaux à ne pas «être lâches».
Si Les Républicains ont ouvert la voie à un vote positif, les Écologistes et le Parti socialiste hésitent, tandis que le reste de la gauche penche pour une opposition plus franche. Fabien Roussel et Manuel Bompard ont invoqué «la perspective de l'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne ou à l'OTAN» qui figure dans le texte soumis au vote. Une «ligne rouge» aussi pour Jordan Bardella, qui a toutefois laissé planer le suspense sur la décision du RN.
«Tout le monde aujourd'hui en Europe a conscience qu'il faut faire plus si on ne veut pas que la Russie l'emporte. Et c'est le sens de l'accord bilatéral qui sera soumis au vote devant le Parlement», a expliqué une source proche de l'Elysée.