Plus de vingt ans après les menaces d’attentats contre le réseau SNCF, deux membres du groupe AZF sont jugés à partir de ce mardi devant le tribunal correctionnel.
Une affaire policière digne d’un film d’action va enfin connaître son dénouement. Dès ce mardi, deux membres du groupe AZF, qui avait fait trembler la France il y a vingt ans avec ses menaces d’attentats contre le réseau SNCF, vont être jugés à Paris. Leur procès devait initialement se tenir en juin, mais avait été reporté à ce mardi 13 février. La qualification de terrorisme n’a pas été retenue dans cette affaire, évitant aux deux suspects d’être jugés devant les assises.
Michel D., 76 ans, chef d'entreprise à la retraite, et une de ses anciennes employées, Perrine R., 61 ans, formatrice en bâtiment, devront répondre devant le tribunal correctionnel d'association de malfaiteurs et fabrication et détention sans autorisation d'engins explosifs.
Le groupe avait envoyé neuf lettres à l’Élysée et au ministère de l’Intérieur entre décembre 2003 et mars 2004, assurant avoir placé plusieurs bombes sous le ballast de voies ferrées. AZF se considérait comme «groupe de pression à caractère terroriste secrètement créé au sein d’une confrérie laïque à spécificité éthique et politique», et avait menacé dès décembre 2003 de commettre plusieurs attentats, contre une demande de rançon de plusieurs millions d’euros. Des menaces qui avaient été prises très au sérieux par le ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy.
«Mon gros lou» et «Suzy»
L’affaire avaient également été marquée par la correspondance digne de roman d’espionnage entre les autorités et le groupe de malfaiteurs. En effet, le ministère de l’Intérieur avait glissé dans les colonnes de la rubrique «Message personnel» du quotidien Libération, une missive codée à l’attention du groupe. «Mon gros loup, ne prenons pas de risques inutiles, le plus tôt sera le mieux. Donne-moi tes instructions. Suzy», suivi d’un numéro de téléphone, le surnom «Mon gros loup» désignant AZF, et «Suzy», Nicolas Sarkozy.
Pour rendre leurs menaces crédibles, AZF avait donné des indications sur l’emplacement de l’un des engins, qui a effectivement été retrouvée par les autorités le 21 février 2004 sur la ligne Paris-Toulouse à hauteur de Folles (Haute-Vienne). L’explosif était «sophistiqué» et en état de fonctionner. Une seconde bombe avait été découverte fortuitement par un agent SNCF le 24 mars 2004 dans l'Aube, sur la voie Paris-Troyes-Bâle.
C’est après cette seconde découverte que le groupe de malfaiteurs avait annoncé, dans un courrier aux autorités, la suspension de son action en précisant «sans rancune et à bientôt». L’affaire aurait pu en rester là, jusqu’à leur dénonciation, en septembre 2017, par un proche de Perrine R. et Michel D. Ce dernier a alors reconnu les faits. Il a cependant démenti avoir voulu semer la «terreur» dans le pays.
«Cette opération n'a jamais été faite pour provoquer un accident ou un attentat», a-t-il affirmé lors de l'audience qui s'est tenue en juin dernier, expliquant que l'argent de la rançon devait servir à réaliser des «prototypes opérationnels pour la production et l'utilisation d'énergies nouvelles non polluantes et illimitées».