Un mois après son adoption tumultueuse au Parlement, le Conseil constitutionnel a censuré totalement ou partiellement ce jeudi 32 articles (sur 86) de la loi immigration les considérant comme des «cavaliers législatifs». Mais de quoi s'agit-il ?
La décision était très attendue aussi bien par la majorité présidentielle que par les oppositions. Saisi à la fois par Emmanuel Macron, la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet et par les députés et les sénateurs de gauche, le Conseil constitutionnel a censuré, ce jeudi 25 janvier, plus du tiers de la loi immigration.
Dans le détail, sur 86 articles, les neuf membres de l'instance ont censuré trois articles sur le fond, ont émis des réserves d'interprétation sur deux autres et n'en ont validé que dix. Surtout, 32 articles ont été censurés partiellement ou totalement parce qu'ils ont été jugés comme étant des «cavaliers législatifs».
Important : Le @Conseil_constit censure partiellement la loi "Immigration".
Sur 86 articles :
- 32 articles censurés pour motifs de procédure (cavaliers)
- 3 articles censurées au fond
- Réserves d'interprétation sur 2 articles
- 10 articles validés
=> https://t.co/6wH6iAG5PK pic.twitter.com/YYtum8ZpXQ— Nicolas Hervieu (@N_Hervieu) January 25, 2024
Concrètement, un «cavalier législatif» est un hors sujet. Il s’agit d’un article de loi portant sur des mesures dont on estime qu'elles n'ont rien à voir avec le sujet dont traite le projet ou la proposition de loi.
D'une certaine façon, c'est un peu comme si celui qui amende ledit article de loi parie sur le fait qu’il passe inaperçu. Dans ce contexte, il est d'ailleurs intéressant de se pencher au sens premier du mot «cavalier».
Issu de l'italien «cavaliere», dérivé du latin «caballus» qui veut dire «cheval», ce serait presque dire ici que, d'après le Conseil constitutionnel, les membres du Parlement ont eu, pour faire passer leur texte, un comportement un peu «cavalier», voire qu'ils ont «agi à la hussarde», car les hussards étaient aussi des cavaliers.
Un cavalier peut chuter
Sauf qu'il arrive parfois, et c'est le cas ici avec la loi immigration, que le cavalier chute en cours de procédure législative, ne répondant pas à l’article 45 alinéa 1 de la Constitution qui dispose que tout amendement doit présenter «un lien, même indirect», avec le texte concerné.
Concernant la loi immigration, parmi les principales mesures censurées, l'on retrouve notamment les dispositions sur le regroupement familial, sur les titres étudiants (notamment l’instauration d’une caution), la délivrance du titre pour des motifs de santé ou encore les dispositions sur les prestations sociales.
Le texte voté au Parlement prévoyait également d'imposer aux non-Européens une durée de résidence minimale pour bénéficier de prestations sociales, dont les allocations familiales, fixée à cinq ans pour ceux ne travaillant pas et à trente mois pour les autres.
De même, la fin de l’automaticité du droit du sol pour les enfants d’étrangers nés en France a également été censurée par le Conseil constitutionnel. Le projet de loi obligeait les jeunes nés de parents étrangers à manifester leur volonté d’obtenir la nationalité française entre 16 et 18 ans.
La plupart de ces mesures censurées avaient été réclamées par la droite parlementaire, indispensable au camp présidentiel pour faire adopter son texte au Parlement.